«Ils m’ont mis à genoux, tiré par les cheveux en arrière et demandé à leurs camarades d’apporter un couteau pour m’égorger», raconte Jawhar Ben M’Barek, sa mésaventure, vendredi, à Douz. Et le lendemain, encore un «samedi noir» à Souk El Ahad.

Par Zohra Abid


Le leader de Doutourna, qui participait à une rencontre, lundi à El Téatro, a raconté aux présents le film d’horreur, comme il l’a vécu, vendredi à Douz et le lendemain à Souk El Ahad, lorsque des Salafistes ont perturbé la réunion à laquelle il participait et l’ont violemment agressé.

«Ils étaient 40 ou 50 jeunes déchaînés. Ils étaient en majorité des gamins, 15, 16, 18 ou tout au plus 20 ans. Ils sont venus tous en ma direction en criant Allahou Akbar. Tous étaient munis d’armes blanches, de matraques en fer, ou en bois. J’ai été sauvé par les membres de l’Union des Sans emploi, qui ont évacué un passage pour que nous puissions prendre nos voitures, dont toutes les vitres ont été brisées. Parmi nos sauveurs, il y a eu des blessés, je m’excuse pour ce qui leur est arrivé et je les remercie», raconte encore M. Ben M’Barek. Et d’ajouter, la voix cassée, que son agression a été programmée et qu’il n’ y a pas le moindre doute sur l’existence d’un plan et d’une coordination entre certaines parties pour le tuer.

M. Ben M’Barek qui traînait sa jambe (blessée par le jet des chaises, les coups de bâtons et de pieds) n’est resté qu’une trentaine de minutes dans la conférence organisée en guise de soutien et de condamnation par ses collègues universitaires, des défenseurs des droits de l’Homme, des avocats, des représentants de l’opposition, d’autres de la société civile, de l’Union des Sans emploi, de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt), du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), d’Amnesty international…

 

Hachemi Ben Fraj, Jawhar Ben M'Barek et Zohra Triki témoignent.

La parole a été ensuite cédée aux témoins mais aussi à quelques militants de Doustourna comme Zohra Triki, qui a reçu des coups à la tête et un peu partout sur le corps.  Et elle n’était pas la seule à en recevoir. D’autres femmes, par pudeur (et orgueil), ont préféré ne pas donner leur témoignage.

Dans la salle d’El Téatro, les présents (l’intelligentsia de la Tunisie, la crème de la crème du pays) ne sont pas restés insensibles. Surtout après avoir entendu les témoignages des uns et des autres. Chacun a passé en revue une partie de ce qu’il a vécu à Kebili.

Dans son intervention,  Hachemi Ben Fraj a déclaré qu’il n’existe qu’une seule solution pour arrêter les violences. «Ces groupes fanatiques doivent être arrêtés par les autorités sinon ils vont poursuivre progressivement les agressions. Le gouvernement est appelé à protéger les personnes et les leaders politiques. Mais, il semble que ce même gouvernement est incapable de le faire», a-t-il déploré.

Vers la fin, les universitaires, les avocats, les représentants de la société civile, les politiques (dont plusieurs constituants), indignés, ont pris des recommandations et décidé de faire le nécessaire. Pour que le gouvernement agisse au plus tôt avant qu’il ne soit trop tard.

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