Un rapport publié au début du mois par l’Institut pour les études de sécurité, dépendant de l’Union européenne (UE), analyse les révolutions au sud de la Méditerranée et indique les voies d’une future coopération euro-méditerranéenne.


«Les émeutes en Tunisie et en Égypte ont été déclenchées par des citoyens ordinaires sur fond de misère sociale et économique, de frustration et de privation», indique les auteurs du rapport intitulé ‘‘The Arab democratic wave: How the EU can seize the moment’’ (La vague démocratique arabe: Comment l’UE peut saisir le moment). Selon eux, deux évolutions ont joué un rôle majeur dans ces révolutions. D’abord, «jeune génération arabe est éduquée et très politisée». Ensuite, l’«émergence des femmes et le recul des structures patriarcales» ont participé de cette transformation sociale.
«Cette dynamique ne s’est pas accompagnée de la transformation correspondante du système politique», admettent les auteurs. Pis encore: «la situation des droits de l’homme dans de nombreux pays de la région s’est considérablement détériorée depuis quelques années et une évolution marquée vers l’autoritarisme peut être observée», ajoutent-ils.

Promouvoir un nouveau processus politique
«Pour autant, l’Union européenne (UE) n’a fait aucun effort, dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen, pour lier les échanges commerciaux au respect des droits de l’homme et des libertés civiles. Il est temps maintenant qu’elle s’investisse de manière proactive dans la région à la fois financièrement et politiquement. Surtout, elle doit promouvoir un nouveau processus politique, lequel ne sera crédible que si les partis islamiques sont autorisés à y participer.
«Les événements récents au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont essentiellement dus à une hausse des prix mondiaux des produits alimentaires et des ressources énergétiques insupportable pour des populations appauvries, souffrant d’un fort taux de chômage, chez les jeunes surtout, et dirigées par des régimes autocratiques corrompus.
«La société civile a démontré qu’elle est désormais assez forte pour défier les gouvernements arabes ; les mouvements islamistes n’ont quant à eux joué qu’un rôle marginal.
«L’UE doit reconsidérer sa position à cet égard et soutenir activement la transition démocratique sans interférer dans les choix du monde arabe. Il lui faut également revoir ses politiques d’engagement économique dans la région, notamment la Politique européenne de voisinage (Pev), promouvoir la création d’emplois ainsi que la construction et le remplacement des infrastructures régionales.

Consolider la transition démocratique
«L’UE a un rôle capital à jouer dans les semaines et les mois à venir pour consolider la transition démocratique en Tunisie, en Égypte, et ailleurs dans le monde arabe. Avec la Pev, l’Union a les outils nécessaires pour promouvoir la réforme politique ; il lui faut pour cela réviser les Programmes indicatifs nationaux de la Pev, revoir cette Politique avec la Tunisie et l’Égypte, utiliser l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme afin de soutenir le processus de transition et activer la Facilité de gouvernance ainsi que le Fonds d’investissement de voisinage. Elle devrait également être prête à fournir une assistance électorale immédiate. Elle devrait en outre accorder rapidement un statut avancé à la Tunisie, lequel pourrait servir de base à un nouvel accord de voisinage renforcé avec ce pays. Enfin, l’UE devrait concentrer son attention sur la question cruciale de la réforme constitutionnelle en Tunisie et en Égypte.»

* Le rapport a été réalisé par un groupe d’experts méditerranéens, sous la direction d’Álvaro de Vasconcelos. Les contributeurs sont Amr Elshobaki, George Joffé, Sami Kamil, Erwan Lannon, Azzam Mahjoub, Luis Martinez, Mohammed Al-Masri, Gema Martín Muñoz, Mouin Rabbani, Abdallah Saaf et Paul Salem.