Qu’est-ce qui a changé depuis la révolution en Tunisie. La liberté a apporté beaucoup de désordre. Mais encore? Pas grand chose en somme, et plutôt en mal qu’en bien. Jugeons-en sur pièces…

Par Dhafer Charrad*


Avant, le président ne voulait rien faire pour le bien du pays. Maintenant, le président ne peut constitutionnellement rien faire pour le bien du pays.

Avant, un parti unique imposait ses points de vue. Maintenant, un parti, qui s’est allié bizarrement à deux supposés concurrents, impose ses points de vue.

Avant, l’opposition était inexistante et le parlement acceptait tout ce qu’on lui présentait au vote. Maintenant, l’opposition existe mais le parlement, à cause d’une coalition contre-nature, accepte tout ce qu’on lui présente au vote.

Avant, les parents et les proches du président s’accaparaient le gâteau Tunisie. Maintenant, les parents, les proches et les sympathisants du parti majoritaire s’accaparent le gâteau Tunisie.

Avant, le chômage était important. Maintenant, le chômage est beaucoup plus important.

Avant, on avait un taux de croissance faible. Maintenant, nous avons un taux de croissance nul ou  négatif.

Avant, les ministres étaient incapables de bien gérer le pays car ils manquaient de courage. Maintenant, les ministres sont incapables de bien gérer le pays car sans expérience et sans compétences.

Avant, on avait une police qui, à sa manière, faisait régner le calme et la sécurité. Maintenant, nous avons une police amorphe et incapable, par exemple, de gérer une bande de cagoulés et de barbus qui sème la peur un peu partout.

Avant, on était en bons termes avec la Libye, qui résorbait une partie de notre chômage. Maintenant, compte tenu de sa révolution et de sa situation instable et chaotique, la Libye a renvoyé nos travailleurs et n’est pas encore prête à les réembaucher, malgré les déclarations soporifiques des dirigeants des deux pays sur l’amitié et la fraternité entre les deux peuples.

Avant, on avait des sociétés réellement en bonnes santé et qui embauchaient mais dont les bénéfices étaient abusivement accaparés par quelques proches du pouvoir. Maintenant, beaucoup de ces sociétés sont mises en difficulté et en quasi cessation d’activité.

Avant, on pouvait compter sur nos hommes d’affaires pour investir et ramener  des partenaires étrangers. Maintenant, ces hommes d’affaires sont mis à l’index et sur le banc des accusés et sont directement ou indirectement stoppés dans leurs initiatives essentielles à la santé économique du pays.

Une nouvelle révolution est elle inévitable?

Si la réponse est oui, ça sera malheureusement le chaos pendant de très longues années pour notre cher et beau pays et pour nos enfants, car à l’évidence ça ne sera pas pacifique et aucune personne ni aucun courant politique n’en sortira ni grandi ni vainqueur.

De grâce, évitez le désastre à notre chère Tunisie, rassemblez les vraies forces du pays, choisissez les meilleurs et les plus compétents qui conviennent le mieux au pays et non pas à vos partis, et oubliez, en cette période transitoire et vraiment précaire, le désir immédiat et incontrôlable des chaises, du pouvoir absolu, de la vengeance, de l’argent, des compensations immédiates et du changement des habitudes et du train de vie quotidien des tunisiens

L’histoire sait ce qu’elle doit retenir et elle ne pardonnera jamais à ceux qui avaient la possibilité de sauver le pays mais n’avaient rien fait.

* Diplômé en sciences économiques et planification.

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