khademi battikh 7 7

Othman Battikh n'est plus mufti de la république parce qu'il s'est toujours montré indépendant et refusait de rouler pour un parti au pouvoir, qui se croit dépositaire de l'islam pur et dur.

Par Zohra Abid

 

Cette indépendance, qu'il avait observé aussi sous Ben Ali, quitte à se montrer très discret, n'a pas joué en faveur du mufti de la république Othman Battikh. Au contraire, il a été remplacé, samedi 6 juillet, à 3 jours du début de ramadan, par Hamda Saïed, connu par son allégeance à l'ex et à l'actuel parti au pouvoir, à savoir le Rassemblement constitutionnel démocratique (Rcd) et Ennahdha, autant dire un retourneur de veste invétéré qui a siégé à la Chambre des députés entre 1989 et 1994, en se faisant élire sur une liste du RCD.

Les positions «hérétiques» du cheikh Battikh

Le président provisoire de la république Moncef Marzouki en a voulu ainsi, sans doute sur une proposition (ou une imposition) du chef du gouvernement provisoire, l'islamiste Ali Lârayedh.

Selon le Syndicat des imams, M. Battikh n'est pas du goût du parti au pouvoir et il a toujours critiqué l'envoi de jeunes tunisiens au jihad en Syrie, opération que soutiennent tapageusement les dirigeants d'Ennahdha.

Le cheikh Battikh, souvenons-nous, a affirmé, en avril dernier, que «la guerre en Syrie ne concerne pas directement les Tunisiens», ajoutant que «le jihad des Tunisiens en Syrie nous cause beaucoup d'embarras, à nous et à nos frères syriens.»

L'ex-mufti a aussi déclaré: «Hier, les jeunes émigraient clandestinement en Italie, aujourd'hui, ils ont changé de destination et, moyennant finances, ils se dirigent vers la Syrie» Et d'ajouter, marquant sa différence vis-à-vis des dirigeants islamistes: «Je tiens aussi à préciser que ceux qui font des fatwas, pratique étrangère à nos traditions, arrivent aujourd'hui, malheureusement, à influencer les familles et à faire envoyer leurs enfants au jihad».

Le syndrome d'Al-Azhar

Tout en affirmant que «les affaires syriennes sont du seul ressort des Syriens», le cheikh Othman Battikh a indiqué également aux médias que «ce qu'on appelle le jihad du nikah (du mariage), n'est autre qu'une forme de prostitution, sans oublier ce qui en résulterait comme maladies sexuelles.» Il faisait allusion aux Tunisiennes envoyées en Syrie pour s'offrir à leurs «frères» jihadistes et participer ainsi au jihad au nom d'Allah.

Le ministre des Affaires religieuses Noureddine Khademi, qui est un fervent partisan de l'envoi de Tunisiens pour le jihad en Syrie, a, selon le Syndicat des imams, planifié cet mise à l'écart depuis plusieurs jours. Il a tout fait ausi pour limoger au plus vite Othman Battikh, surtout après les évènements en Egypte et la position du cheikh d'Al Azhar favorable à la destitution de l'ex-président Mohamed Morsi.

Derrière ce limogeage, il y aurait aussi le travail de lobbying du très salafiste Houcine Laâbidi, imam de la Zitouna, indique la même source.