Al-Joumhouri

Un rapport, interne et confidentiel, passe en revue les erreurs et les errements ayant causé l'échec électoral d'Al-Joumhouri. Néjib Chebbi tiendra-t-il compte de ses conclusions?

Par Hamdi Hmaidi

Ce rapport, rédigé par une commission d'évaluation émanant du bureau politique du parti Al-Joumhouri, à partir de la collecte des avis des adhérents, a identifié les lacunes qui ont essentiellement trait à la crise politique et structurelle qu'a connue le parti, aux alliances peu pertinentes faites avec d'autres formations, à la défaillance de la stratégie en matière de communication et au manque de moyens humains, matériels et financiers.

Alignement contre-nature sur les positions d'Ennahdha

S'agissant de l'identité du parti et de son positionnement par rapport au contexte général, les adhérents interrogés ont mis l'accent sur le flou, l'hésitation et l'indécision qui ont caractérisé ces dernières années l'action entreprise par les dirigeants d'Al-Joumhouri. Le passage brutale de l'attitude très critique à l'égard d'Ennahdha à l'alignement sur ses positions, la fusion avec un parti libéral dont le programme est antithétique avec les principes du socialisme, l'adhésion précipitée au front de l'Union pour la Tunisie (UPT), sont considérés comme les principales raisons pour lesquelles ont été enregistrées beaucoup de démissions, plusieurs sympathisants ont pris leur distance, l'opinion publique s'est forgé une image négative du parti, les militants ont énormément perdu de leur capacité de persuasion et l'unité de la formation politique a été fortement ébranlée.

D'après ses militants, Al-Joumhouri a souffert d'un fossé qui sépare le discours de ses dirigeants des attentes des masses. Ainsi, certaines positions de principe ont été en décalage par rapport à la tendance générale dans le pays. Il s'agit en particulier de la position du parti par rapport à ce qui s'est passé en Egypte et par rapport à la première mouture de la Constitution tunisienne, en juin 2013, rejetée par une grande partie de la classe politique. La participation de Néjib Chebbi, leader du parti, au 1er gouvernement de Mohamed Ghannouchi, en 2011, en tant que ministre du Développement régional, aurait été perçue comme le premier signe de ce décalage.

Al Joumhouri

Après les échecs électoraux et les nombreuses défections, Al-Joumhouri est de moins en moins visible.

Manque de cohérence et de détermination

Une lecture erronée de la réalité a conduit à un échec cuisant aux élections législatives de 2014. Selon les mêmes personnes interrogées, des mutations importantes ont eu lieu, entre 2011 et 2014, mais elles n'ont pas été prises en considération. N'ayant plus confiance en Ennahdha, les gens ont cherché plutôt à s'en débarrasser. Nidaa Tounès a trouvé un terrain favorable qu'il a su bien exploiter. Bien que des sondages le donnaient perdant, Al-Joumhouri n'a pas essayé de rectifier le tir.

Sur le plan structurel, les adhérents déplorent le fait qu'il n'ait pas été possible de constituer un véritable parti avec des orientations et une organisation claires. Il en est résulté une faiblesse au niveau des relations entre les différentes instances et un manque de communication entre les cadres. La mobilisation des moyens financiers a souffert de ce manque de cohérence et de détermination.

La commission d'évaluation ne s'est contentée de recueillir les défaillances constatées. Elle a pris note des solutions préconisées.

Nejib Chebbi

Néjib Chebbi est-il l'atout d'Al-Joumhouri ou son talon d'Achille?

Cette sorte d'«autocritique» permettra-t-elle à Al-Joumhouri de renaître de ses cendres? Rien n'est moins sûr, le parti ayant préféré ne pas discuter le contenu de ce rapport interne et le ranger dans un tiroir pour continuer à fonctionner comme il l'a toujours fait, en petits comités et vase clos, en cherchant d'improbables nouvelles alliances.

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