Dans des révélations publiées par le journal ‘‘Assabah’’ du 11 février, l’ancien officier de police Lotfi Derouiche affirme avoir été chargé par les services de Ben Ali d’assassiner plusieurs opposants tunisiens réfugiés à l’étranger.
Cela s’est passé en 1991. Selon l’ancien officier de police, qui dit avoir travaillé à la «brigade contre le crime» depuis 1970, Mohamed Ali Ganzoui lui avait confié la mission d’éliminer physiquement des opposants vivant à l’étranger, notamment Ahmed Bennour, Salah Kerker et Ahmed Manaï. Voici sont récit: «Après avoir passé un certain temps en France, le secrétaire d’Etat [Ganzoui était à l’époque chef des services spéciaux] m’a téléphoné pour me convoquer d’extrême urgence à Tunis. Je l’ai rencontré à son bureau où il m’a expliqué que ma mission en France n’était pas de police judiciaire, telle que définie officiellement, mais plutôt autre. Et alors que je lui demandais des explications sur ce qu’on attendait exactement de moi, il me remît un pistolet, d’un gros calibre et d’un modèle peu connu dans les services de police. Il m’expliqua que c’est un silencieux, cadeau spécial du président de la république pour les missions que j’aurais à exécuter. Il me rappela l’assassinat de l’iranien Chapour Bakhtiar, éliminé par les services secrets iraniens la même année à Paris [7 août 1991] et insista sur le caractère ultra secret de la mission que j’aurais à exécuter et qui consistait à éliminer certaines figures de l’opposition à Ben Ali telles que Ahmed Bennour, Salah Karker et Ahmed Manaï. J’ai dénoncé catégoriquement et de la manière la plus nette la mission qui m’était confiée et j’ai insisté auprès du secrétaire d’Etat que je refuserai toutes les tentatives, d’où qu’elles viennent, pour me convaincre du contraire. Ganzoui me répondit que la mission était à la demande de Ben Ali et que lui-même l’approuvait avec enthousiasme. J’ai réitéré mon refus et j’ai quitté les lieux pour téléphoner à un ami et l’informer des faits. Ce dernier téléphona aussitôt à Ben Ali pour le mettre au courant de la demande du secrétaire d’Etat et lui exprima son refus de ces procédés. Je ne connais pas la réponse que lui a faite Ben Ali, mais mon ami m’a conseillé d’oublier tout et de reprendre mon travail en France comme si de rien n’était. Plus tard, mon ami m’informa qu’il avait déduit de son entretien téléphonique avec Ben Ali que ce dernier était au courant de la proposition du secrétaire d’Etat d’assassiner quelques symboles de l’opposition».
L’ancien officier de police raconte par la suite sa rencontre fortuite, au salon d’honneur de l’aéroport de Tunis-Carthage, avec Leila Ben Ali, dont il dit connaître le passé dans les moindres détails, puis les menaces de Ganzoui à son encontre, son rappel de France et sa descente aux enfers, puisqu’il a été démis de ses fonctions et jeté en prison …