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Le départ de Hamadi Jebali de la direction d'Ennahdha n'a pas fini de susciter commentaires et analyses. Il révèle, en tout cas, un malaise profond au sein du mouvement islamiste et l'absence de démocratie réelle dans ses structures.

Par Moncef Dhambri

Même si Hamadi Jebali tente de protéger sa démission des plus grandes discrétion et dignité, et ne dit aucun mot sur le stalinisme nahdhaoui, les euphémismes et les demi-mots de l'ex-secrétaire général du parti islamiste laissent transparaître quelques vérités sur l'autoritarisme qui règne à Montplaisir.

Derrière le ras-le-bol, des désaccords profonds

Pour Riadh Chaïbi, un autre Nahdhaoui démissionnaire qui a créé son propre parti, El-Bina El-Watani (Construction nationale), la démission de l'ancien Premier ministre islamiste était «prévisible, étant donné les désaccords qui ont éclaté au sujet de la formation d'un gouvernement de technocrates, en février 2013. Ce départ a tout simplement été reporté».

S'exprimant au micro d'''A la page'' sur Mosaïque FM, M. Chaïbi a expliqué que la proposition faite par Hamadi Jebali, au lendemain de l'assassinat de Chokri Belaïd et de la crise que ce meurtre avait entraînée, de recourir à la solution d'un gouvernement de technocrates indépendants a été refusée par la direction nahdhaouie. Il s'agissait là, dit-il, d'un «désaccord fondamental, et ce à quoi nous assistons aujourd'hui, c'est-à-dire le départ de Hamadi Jebali, n'est qu'une suite logique de cet incident».

Riadh Chaïbi a également rappelé qu'à l'époque ce conflit, qui a conduit au remplacement de la Troïka 1 de Hamadi Jebali par la Troïka 2 d'Ali Lârayedh, a été minimisé par les instances dirigeantes d'Ennahdha et présenté comme une simple différence d'appréciation qui n'affectait en rien l'unité du parti islamiste.

Selon M. Chaïbi, ce coup d'éclat du secrétaire général démissionnaire d'Ennahdha a bien plus à voir avec l'exaspération et la révolte d'un très haut responsable frustré qu'un simple positionnement politique qui lui permettrait de mieux servir ses ambitions présidentielles: «Là-dessus, le communiqué annonçant officiellement cette démission est on ne peut plus clair», insiste-t-il.

Derrière la façade trompeuse

Quoi que puissent en dire les dirigeants de Montplaisir, selon Riadh Chaïbi, le départ de M. Jebali d'Ennahdha, le numéro 2 dans la hiérarchie du parti islamiste et le premier chef de gouvernement élu après la Révolution, représente «une perte indéniable, une très grande perte» pour la formation nahdhaouie. Pour lui, le sacrifice qu'Ennahdha vient de faire de son secrétaire général en dit long sur l'autoritarisme qui règne au sein de cette formation: «Cette notion de démocratie et de prise de décision démocratique (au sein d'Ennahdha, NDLR) ne sont qu'illusoires. Il s'agit d'une démocratie de façade et la réalité des choses est toute autre», met-il en garde.

Même si les observateurs avisés n'ont jamais nourri la moindre illusion sur le «démocratisme» des Nahdhaouis, ce que le parti de Rached Ghannouchi donne à voir, aujourd'hui, sa manière de traiter les siens et la manière dont ses débats internes sont conduits confirment leurs suspicions.

La démission de Hamadi Jebali, ajoutée à d'autres mises à l'écart qui l'ont précédée et d'autres jets d'éponge qui sont encore à venir, selon Riadh Chaïbi, balaie toutes ces idées selon lesquelles Ennahdha s'est adapté à la modernité et qu'il a inventé une synthèse islamiste unique qui allie démocratie et islamisme.