Qui Moncef Marzouki menace-t-il en affirmant qu’une autre révolution est possible en Tunisie? La «troïka», coalition gouvernementale dont il est un membre zélé, ou Ennahdha, qui exerce la réalité du pouvoir?
Le président de la république a jugé mercredi, 25 juillet, dans son discours devant l’Assemblée nationale constituante (Anc), qu’une démocratie véritable devait être mise en œuvre, faute de quoi une nouvelle révolution interviendrait. Pas moins?
«Le peuple qui vous a élus n’acceptera pas une démocratie de façade, il pourrait alors être poussé à une nouvelle révolution», a-t-il déclaré, à l’occasion de la Fête de la République. «Quelle valeur pour une démocratie qui ne nourrit pas les ventres affamés?», a-t-il lancé devant les députés. «La révolution (de janvier 2011) nous a permis de parachever notre indépendance et nous a offert la démocratie et la république (...), mais ni l’indépendance ni la démocratie ni la république ne sont des acquis garantis à long terme», a-t-il encore relevé.
On ne sait pas à qui M. Marzouki s’adresse exactement. Aux Constituants, dont la tâche se résume à rédiger la nouvelle constitution? Aux membres du gouvernement dirigé par le Nahdhaoui Hamadi Jebali et dont le bilan est pour le moins très mitigés ? Ou bien, comme nous le pensons, aux dirigeants d’Ennahdha, dont il est pourtant l’allié à l’insu de son plein gré?
M. Marzouki, qui parle (presque) comme un opposant, a-t-il oublié qu’il campe depuis bientôt huit mois au Palais de Carthage et qu’il est responsable, ne fut-ce que partiellement, des échecs et des errements de la «troïka» à laquelle il appartient, et qu’il défend, du reste, bec et ongles?
Ce dédoublement de la personnalité, chez ce psychiatre, est pour le moins inquiétant. Il témoigne, en tout cas, d’une crise existentielle profonde. M. Marzouki serait bien inspiré de faire son auto-analyse: le «mariage de raison» avec Ennahdha ne semble pas lui réussir, malgré toutes ses fausses dénégations.
Imed Bahri