Les explications apportées par le gouvernement au passeport diplomatique dont bénéficie Rached Ghannouchi sont aussi oiseuses que démagogiques.
L’information selon laquelle le président d’Ennahdha (au pouvoir) circule avec un passeport diplomatique, délivré par le ministère des Affaires étrangères, dirigé par son gendre, Rafik Abdessalem, a suscité une vive controverse dans les médias sociaux.
Le parti Ennahdha s’est d’abord fendu d’un improbable démenti : les islamistes, on le sait, quand ils sont au pouvoir, deviennent de fieffés menteurs. Mais ne pouvant aller loin dans la dénégation, les Nahdhaouis ont préféré changer le fusil d’épaule. Et c’est le ministre des Affaires étrangères en personne qui a dû se lancer corps et âme dans la bataille.
L’explication que M. Abdessalem a donnée ne tient cependant pas la route: «Cheikh Rached Ghannouchi dispose en effet d’un passeport diplomatique qui lui a été délivré tout à fait légalement sur la base d’une décision du président de la république accordant ce document officiel aux présidents des partis représentés à l’Assemblée nationale constituante (Anc)».
Soit, et même si on voudrait bien avoir connaissance du texte de la décision présidentielle (existe-t-elle vraiment ?), on peut tout de même s’étonner du fait que seul Rached Ghannouchi, parmi les chefs de partis, bénéficie, au jour d’aujourd’hui, de ce privilège. Pourquoi cette ségrégation? Anticipant cette question, M. Abdessalem a cru devoir objecter, dans la même veine démagogique : «Si les autres chefs de partis représentés à l’Assemblée n’ont pas demandé d’avoir ce document, c’est leur problème».
En d’autres termes, si on n’avait pas découvert le pot aux roses, les chefs de partis parlementaires n’auraient jamais appris qu’ils ont droit à un passeport diplomatique... comme M. Ghannouchi, le beau-père de M. Abdessalem.
I. B.