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Après 3 siècles de silence, l'horloge de la grande mosquée de Testour s'est remise à tinter de nouveau, samedi 20 décembre 2014, jour de silence électoral.

Par Anouar Hnaïne

Grand jour pour Testour, ville du nord-ouest tunisien : l'horloge de la Grande mosquée, construite au en 1.630 après J.-C. par Mohamed Tagharinou, immigré d'origine andalouse, a repris son rythme.

Trois siècles sans tic-tac

Samedi, 11 heures. La ville est animée, branle-bas de combat devant la mairie. La fête est dans l'air et les habitants sont fiers de participer à un événement qui leur tenait à cœur.

Mourad Sakli, ministre de la Culture, Christiane Bohrer, directrice de l'Institut Goethe, les journalistes et plusieurs membres d'associations nationales sont venus partager la joie des citoyens de Testour à l'occasion de l'inauguration de la fameuse horloge dont les travaux de restauration ont commencé en 2012.

Inauguration-Horloge-de-la-Mosquee-de-Testour

De nombreux invités sont venus fêter avec les Testourien(ne)s le retour du tic-tac... au coeur de la ville.

Dégustation de spécialités testouriennes, puis direction vers la mosquée restaurée. Un large cour, chapiteaux antiques, un haut minaret original... Le bas de l'édifice est une tour carrée, qui obéit à une architecture sunnite, le haut est formé d'une tour octogonale, selon les normes hanéfites. Elle est richement décorée de céramique émaillée : deux étoiles de David noires sur les carreaux en haut du minaret attestent de la présence d'une communauté juive importante.

Trois siècles de silence, pas moins, que la mécanique de l'horloge n'a pas émis son tic-tac, et, grâce aux efforts conjugués de la société civile, de la mairie de Testour, de l'Association de sauvegarde de la médina de Testour (ASMT) et de l'Institut Goethe, l'horloge s'est mis à fonctionner de nouveau en ce jour de silence électoral. Cette réalisation constitue «un modèle de participation entre les différents partenaires, de la société civile et de l'Etat pour se réapproprier le patrimoine historique», affirme le ministre.

Le rythme de la mémoire

Faire participer la population locale aux enjeux de la restauration et de la préservation des monuments et encourager les tentatives locales, telle est le rôle du projet «Meamarouna» (Notre patrimoine), qui a travaillé sur les sites des trois villages de Aïn Tounga, Mosti et Testour.

Quelle heure est-il?

Tel est le titre de la manifestation de ce 20 décembre 2014. Tout le monde a évidemment le regard fixé sur l'horloge, objet de toutes les curiosités.

Le système de son fonctionnement est très élaboré : les aiguilles tournent de gauche à droite, contrairement au mouvement habituel de la montre. M. Koundi, ingénieur de la région, explique que l'horloge fonctionne à partir d'un satellite et est alimentée par des batteries spéciales. Ce type d'horloge est un bien précieux qu'il faut préserver, soulignant que seul l'Italie et le Chili possèdent de tel genre, ajoute t-il.

Du haut du minaret, on découvre les environs verdoyant de la région, collines et terrains boisés à perte de vue. Maisons basses : quelques unes ont gardé leur toiture d'origine en tuile. Chants religieux sur la place de la mosquée, liesse partagée et enfants enjoués.

Mosquee-de-Testour

Le minaret de la mosquée de Testour incarne l'âme et la mémoire de la ville.

Direction vers la maison de la culture, belle demeure qui vit la naissance de la chanteuse juive Habiba Msika, les hôtes, debout autour d'un patio, la chanteuse Alia Sellami entre en scène, on entend des tic-tac enregistrés, clin d'œil à l'horloge, la voix monte, psalmodie, chants en langue Yidish, une radio émet une chanson de Habiba Msika. Emouvant! On applaudit. Le ministre mélomane apprécie. Alia confie: «Testour est une ville qui m'inspire, peut-être à cause de Msika».

Question subsidiaire: pour combien de temps l'horloge fonctionnera? Au moins 500 ans, répond M. Koundi.

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