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''Bollywood Express'', spectacle haut en couleur, a transporté le public de Carthage, le temps d'une soirée, dans une Inde immémoriale où romance rime avec danse et extravagance.

Par Samantha Ben-Rehouma

Pas un simple spectacle de danse indienne, ''Bollywood Express'', c'est une fusion originale entre théâtre, danse et vidéo. Un spectacle total, en somme, et qui interpelle tous les sens.

Mille et Un Dieux de l'Inde

Varsha, journaliste d'origine hindi et qui vit à Paris, est envoyée en reportage à Mumbai (Bombay pour ceux qui ne vivent pas sur Terre et qui ne savent pas encore que cette ville a été rebaptisée en 1995) pour écrire un article sur Bollywood (contraction de Bombay et Hollywood) la Mecque du cinéma indien. Ce voyage va bouleverser sa vie: elle découvre ses racines, la ferveur des cultures populaires et les troubles de l'amour.

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Le voyage initiatique de Varsha (Ph. Samy Snoussi).

Tout commence par le vol de son portable dans les rues de Mumbai. Un beau vagabond vole à son secours, se bat avec la bande des voleurs de portables et retrouve Varsha, bien contente de retrouver son portable, outil indispensable à sa vie comme elle dit. Mais la vie ne se résume pas à un portable, tu dois découvrir qui tu es, d'où tu viens et où tu vas, lui explique son sauveur. S'ensuit alors un voyage initiatique, épique et romantique jusqu'au Taj Mahal (symbole de l'amour fou que portait l'empereur moghol Shah Jahan à sa femme Mumtaz Mahal) sous l'œil bienveillant de Ganesh, ce petit dieu de la sagesse si attachant, au corps d'enfant ventripotent et à la tête d'éléphant.

Pourvu qu'on ait l'ivresse

Ce voyage intérieur et sensoriel qu'entreprend Varsha, le public va le faire aussi. Dès les premières notes du tube ''Jai Ho'' (il y aura aussi ''O Sava'') du film oscarisé ''Slumdog Millionaire'', la scène et l'arène de Carthage ne font plus qu'un, et ce, mis à part l'entracte, jusqu'au final magistral où nul besoin de rappel puisque la troupe du ''Bollywood Express'' saluera par trois fois un public définitivement conquis !

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Même avec un scénario-déjà-vu: la belle, le bon et le truand, tout est pensé pour nous faire oublier nos soucis.

Les vidéos diffusées en arrière-plan pour mettre le décor ou passer des scènes d'action (poursuite dans les rues de Mumbai, voyage en train, show TV ou coucher de soleil sur le Gange) ajoute à l'originalité de cette comédie musicale. Une love story avec des scènes aux couleurs éclatantes dignes de la Holi (la fête des couleurs en Inde où l'on s'asperge de couleurs), des danses rapides et précises.

Bref, un vrai mix de Broadway et Step Up épicé à souhait de kitsch et d'exotisme, reprenant à la sauce masala les ingrédients (amour, humour, chant) des films indiens... Et même avec un scénario-déjà-vu: la belle, le bon et le truand, tout est pensé pour nous faire oublier nos soucis et une actualité ô combien triste.

Résultat: on n'est pas forcément regardant sur l'histoire, pourvu qu'elle nous divertisse. Et ici ce fut bien le cas !

Namasté en mode Essalam alikom

Quelques petits clins d'œil à la culture tunisienne vinrent épicer un show déjà piquant : ''Yâ Nahla Qahlâ'', chansonnette du sit-com ''Nsibti Lazizâ'', le célèbre ''Café des Délices'' de Patrick Bruel chanté par un vendeur de thé dans le train emmenant Vashar au Rajasthan.

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On n'est pas forcément regardant sur l'histoire, pourvu qu'elle nous divertisse.

Ce dernier, sur le fameux ''Chaiyya Chaiyya'' du film ''Dil Se'' de Mani Ratnam (mais aussi dans l'opening d'''Inside Man'' de Spike Lee), nous raconte avoir croisé une Tunisienne de La Marsa qui lui a parlé de Sidi Bou Saïd, du port El Kantaoui... Puis, il finit son récit par une plaisanterie «Comment s'appelle les habitants de La Marsa... Les Marsayais!!»

Pour le final, tout-est-bien-qui-finit-bien, la demande en mariage du prince à sa belle a été accueillie par des «tzarlitt» (youyous) et des «Aya Mabrouk»; il ne manquait plus que le «tazmir» (klaxon) pour se croire dans un mariage tunisien.

Mais le top revient vraiment au moment où les danseurs – qui n'ont rien à envier aux Chippendales – tombent la chemise et dansent torse-nu devant les cris de la gent féminine et les «Ababab mella bden!!» et les «La hawla walla qouwa»...

A passage to India

Magnifique spectacle de danses et de chants, ''Bollywood Express'' nous a plongé dans les racines et valeurs de l'Inde, avec une jolie histoire dont la morale est «l'Amour triomphe de tous les obstacles même si sa route est semée d'embûches».

Les tableaux s'enchaînent sans temps mort, bravo pour les danseurs et danseuses. On reconnaît ici la patte de la reine de la chorégraphie à Bollywood: Vaibhavi Merchant à qui on doit les époustouflantes danses de Devdas, de Hum Dil De Chuke Sanam et du célèbre ''The Merchant of Bollywood''. Bon sang ne saurait mentir puisque son grand-père, Shri Hiralal Merchant, était lui aussi chorégraphe à Bollywood dans les années 1940.

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Mise en scène remarquable, chorégraphies entraînantes et costumes magnifiques.

Hier soir, il y avait une météo automnale qui est passée inaperçue grâce à un arc-en-ciel oriental, musical et coloré et à l'énergie communicative.

Le piment de ce show – de par sa mise en scène remarquable, ses chorégraphies entraînantes ou bien encore ses dizaines de costumes magnifiques – a mis le feu à Carthage.

Peinture d'une société, émergeant dans le chaos et la confusion, prise dans le conflit entre le monde traditionnel et le monde moderne, ''Bollywood Express'' nous entraine à toute vapeur dans les parfums et les saveurs de ce légendaire pays qu'est l'Inde si chère à Forster, Kipling, Godden, Newby, Edison Fulton Jr., etc.

Le festivalier s'est régalé et ne regrette pas d'avoir pris un ticket pour ce magnifique voyage dont Hindi-Râ que du bien !

Illustration: Photos Samantha. 

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