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Le siège de l'entreprise Talan, dans la zone industrielle de la Charguia I, à Tunis, s'est transformé, le temps d'une exposition, en un véritable musée d'art contemporain.

Par Zohra Abid

Quelques heures avant le vernissage de cette exposition, baptisée «Circumambulation», présentant les oeuvres d'une vingtaine d'artistes de la galerie Abdelaziz Gorgi de Sidi Bou Saïd, du 15 mai au 4 juin 2014, Philippe Cassoulat, directeur général du groupe Talan (cabinet de conseil opérant à Paris, Londres, Bruxelles, New-York, Tunis, Lyon, Hong-Kong et Montréal), Mehdi Houas, président du Groupe Talan Tunisie, Behjet Boussofara, directeur général de Talan Tunisie, ainsi que la commissaire de l'exposition, Aïcha Gorgi, ont donné une conférence de presse pour parler de l'événement.

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Aïcha Gorgi fait sont installation.

Les artistes de la pépinière Gorgi

Au total, une quarantaine d'œuvres sont exposées. En plus des tableaux de peinture et des photographies accrochés sur les cimaises, il y a aussi des installations, des tapisseries... Et, surtout, de la créativité à en revendre. «C'est l'occasion où jamais pour investir dans l'art», a déclaré à Kapitalis, Aïcha Gorgi, propriétaire de la galerie Abdelaziz Gorgi (ancienne galerie Ammar Farhat), une pépinière d'artistes qui attire les collectionneurs et amoureux de l'art moderne et contemporain, de Tunisie et de l'étranger.

La fille de l'artiste Abdelaziz Gorgi était visiblement heureuse. De voir ses artistes, pour la plupart nés dans les années 1980, émerger dans un espace qui va comme un gant à leurs oeuvres. «Nous n'avons encore pas de musée d'art moderne ou d'art contemporain. C'est vraiment dommage. La conception de cet espace est magnifique pour abriter des œuvres. Nous en profitons», a-t-elle précisé.

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Aicha Gorgi et Mehdi Houas sont d'accord: l'art est partout chez lui.

La rencontre avec les médias était aussi l'occasion pour parler de l'art qui a perdu de son aura et sa visibilité malgré l'éclosion de jeunes artistes s'exprimant de plus en plus librement. «Lorsqu'on m'a contactée, il y a près de 2 mois, j'ai accepté sans hésiter. Surtout que je ne suis pas à mon premier événement du genre. J'ai déjà eu une expérience au Square 5, à l'espace du meuble Emporio... Il faut que l'art sorte des galeries et aille vers les gens. Pour cet événement, il me fallait un thème. En découvrant l'espace doté d'un plafond bas et de 4 piliers au milieu, le sujet a été tout  de suite trouvé. C'est ''Circumambulation'' (le mot est tiré du latin : circum, ambulato), c'est-à-dire marcher autour, en arabe c'est du ''tawaf'', comme autour de la Kaâba à La Mecque», explique Aïcha Gorgi.

L'art c'est aussi du sacré

«L'art est inaccessible et appartient au domaine du sacré. Le fait de le mettre au centre est une manière de le vulgariser», précise encore la galeriste, et sans transition aucune, revient à son thème: «N'oublions pas qu'en cette période de transition, nous sommes en train de tourner autour de nous-mêmes. L'art contemporain reflète ce que nous sommes et décrit nos préoccupations. Nous sommes à la recherche de quelque chose et nous tournons en rond. Tourner: c'est aussi une manière d'avancer, d'inventer, d'innover et d'entreprendre». Oui, entreprendre, voilà encore un mot qui plairait beaucoup à Mehdi Houas, le maître du lieu.

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Talan fait parler ses murs...

Aïcha Gorgi n'est pas seulement heureuse. Elle est également fière. Fière de ses artistes, de ses partenaires de Talan, mais aussi d'une autre personne, Dorsaf Ben Abderrazak. «Je dois rendre hommage à la scénographe avec qui j'ai travaillé en symbiose totale pour transformer cet espace en galerie d'art», a-t-elle tenu à ajouter, en invitant les artistes, leurs amis, les critiques et les amoureux de l'art à la table-ronde qui sera organisée en marge de l'Expo Talan, ce samedi 17 mai 2014, autour du thème du mécénat: «L'intérêt et les enjeux».

Promouvoir le mécénat artistique

Mehdi Houas a, de son côté, invité les industriels à aider les artistes, car sans l'art et la créativité, les entreprises n'avanceront pas. «L'art et Talan ont plus d'un point commun. Ils sont témoins de leur temps et acteurs de leur destin. Tous deux ont cette farouche volonté de changer le monde et de l'améliorer», a-t-il lancé, un brin philosophe. «Les artistes tunisiens, qui manquent de mécènes, ont du mal à avancer dans leur création et à trouver des espaces pour exposer. Nous proposons une tribune pour les artistes et ramenons les oeuvres d'art au coeur d'une zone industrielle, qui est aussi, à sa manière, un lieu de création», a ajouté l'ancien ministre du Tourisme.

Selon lui, les industriels ne peuvent pas se passer de la créativité ne fut-ce que parce qu'ils ont toujours besoin d'évoluer et de changer. «Il faut créer un nouveau modèle économique, social et artistique. Nous avons besoin d'artistes qui nous poussent, nous les industriels, vers des projets», enchaîne Mehdi Houas.

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L'Expo Talan sera un rendez-vous annuel, annonce Mehdi Houas.

Persuadé que «l'art n'est pas seulement un divertissement» et qu'«il pousse à réfléchir», l'entrepreneur affirme que cette Expo Talan n'est qu'un début et annonce d'autres évènements du genre qui se tiendront dans le même espace. «Tout mon souhait, c'est de voir d'autres industriels faire pareillement et tout le monde en tirera profit», dit-il, en annonçant que l'Expo Talan sera un rendez-vous annuel.

«Nous sponsorisons à chaque fois un événement. Nous l'avons déjà fait avec le cinéma ainsi qu'avec les concerts de musique, notamment de jazz», a ajouté, de son côté, M. Boussofara.

Sortir des sentiers battus

Philippe Cassoulat, sous le charme des œuvres exposées dans l'espace de 800m2, a annoncé, de son côté, que 150 à 200 salariés de Talan seront ce weekend en Tunisie et qu'ils vont découvrir le talent des Tunisiens – sans jeu de mots inutile –, et tout en sensibilité, en formes et en couleurs. «C'est magique, les jeunes artistes foisonnent. Talan va bien et fait du mécénat. C'est une manière de montrer que la Tunisie fait des choses superbes. Cet événement mettra sans aucun doute en valeur Talan Tunisie. Il y a de la créativité dans l'air et ce que font les jeunes est magnifique. Il est de notre devoir de les encourager et de mettre en lumière leur art», a indiqué M. Cassoulat, un ami de longue date de M. Houas. «Ça remonte à une trentaine d'années, mais je connais la Tunisie depuis 15 ans. Je suis souvent là. Il ne me manque que le passeport vert pour dire que je suis Tunisien, moi aussi», a-t-il précisé.

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Pour Mehdi Houas, l'art et l'entreprise se marient bien.

Mehdi Houas et son équipe de Talan, qui ont de la suite dans les idées, pensent faire tourner l'exposition dans les locaux des autres filiales de Talan dans le monde. «Six ambassadeurs sont invités aujourd'hui au vernissage et nous allons en parler. Pourquoi pas, c'est très possible et ce n'est qu'un début», a-t-il précisé.

M. Houas, qui a personnellement craqué pour au moins 2 œuvres, compte sérieusement donner un petit coup de pouce aux jeunes créateurs, en leur permettant d'exposer dans d'autres pays.

Talan Tunisie emploie 150 ingénieurs. Dans quelques années, ils seront 500. «Notre espace est conçu pour contenir ce nombre», a précisé M. Houas, qui n'est pas du genre à faire mystère de ses ambitions. Et il en a pour son entreprise.

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