Phosphates Banniere

Cette fois-ci, la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) baisse les bras. Face aux perturbations à répétition, elle a annoncé, hier, qu'elle fermait boutique.

Par Marwan Chahla

Ali Houchati, le responsable de l'information à la CPG, a confié, vendredi 8 mai 2015, à Reuters que la paralysie de la Compagnie n'a que trop duré et que la direction de l'entreprise se trouve dans l'obligation de rendre le tablier: «Quelques dizaines de personnes sans emploi qui revendiquent le droit au travail ont interrompu, depuis de très longs mois, la production du phosphate et son transport par train. Ils ont ainsi bloqué les activités de la Compagnie et suspendu toutes ses transactions financières.»

La décision de fermeture de la CPG, fleuron de l'économie tunisienne avant la Révolution, si elle devenait effective, mettrait tout le monde – les victimes désespérés et les coupables suicidaires – dans le même sac et ferait du bassin minier, le tombeur du régime de Ben Ali, le fossoyeur de la Révolution.

La vérité est là – toute évidente. Ce qui se passe à Gafsa et dans les environs est bel et bien un des échecs les plus flagrants de tous les gouvernements qui se sont succédé en Tunisie, depuis le 14 janvier 2011. Rien, ni personne, n'a pu convaincre, pendant les 4 dernières années, les grévistes et les sit-inners qu'il n'est de l'intérêt d'aucune partie que ces perturbations se poursuivent.

Rien ni personne, non plus, n'a eu le courage de taper du poing sur la table et de dire que le pays a plus que supporté qu'une infime minorité se joue ainsi d'une richesse appartenant à toute la communauté nationale.

La vérité est là aussi – dite par les chiffres. En 2010, la CPG avait produit 8,26 millions de tonnes de phosphate. Et pendant les 4 années de la Révolution, elle n'a pu extraire qu'un total de 11,2 millions de tonnes, soit une chute annuelle moyenne de près de 70%, entre 2011 et 2015. Pire encore, depuis le début de la présente année, seulement 650.000 tonnes de phosphate ont été produites, soit l'équivalent de 50% de ce qui a été extrait l'an dernier durant la même période.

Et lorsque ces pertes énormes – officiellement estimées à plus de 2 milliards de dollars durant les 4 dernières années – sont ajoutées aux coups durs que n'a jamais cessé d'encaisser l'industrie du tourisme, l'addition pour l'économie tunisienne devient plus que douloureuse.

Que faudrait-il à Habib Essid et à son équipe pour se décider à prendre les choses en main, pour se montrer fermes et trancher dans le vif?

Dans les coulisses couloirs du Palais de la Kasbah, on dit que le gouvernement a élaboré une série de mesures visant à mettre de l'ordre dans le bassin minier de Gafsa et à relancer le développement dans cette région déshéritée, mais qu'attend M. Essid pour les annoncer ? Et, d'ailleurs, lui qui bouge tellement et multiplie les visites dans les régions, pourquoi a-t-il évité jusque-là de se rendre à Gafsa ?

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