Incendie-Ennahli-Banniere

Les incendies de forêts deviendraient-ils une variante du jihadisme? Cette tactique porte un nom: les experts militaires l'appellent la politique de la terre brûlée.

Par Marwan Chahla

Le feu a pris au Parc d'Ennahli, dans la nuit de jeudi à vendredi, et de nombreuses unités de la Protection civile, la Garde nationale et l'Armée ont été mobilisées pour l'éteindre. L'incendie a été maitrisé, dans premier temps, mais il a repris dans l'après-midi de vendredi, sans raison explicable autre que celle de l'intention malveillante de détruire...

L'origine criminelle de l'incendie

Les spéculations vont bon train sur les causes de cette catastrophe pas si naturelle que ça, qui a ravagé une quarantaine d'hectares de ce fleuron écologique du gouvernorat de l'Ariana. Que l'incendie ait éclaté à partir de plusieurs foyers crédibilise l'hypothèse de l'origine criminelle.

Les premiers éléments de l'enquête donneraient raison à la suspicion qu'il y a eu «main d'homme» dans cet incendie. Le ministre de l'Agriculture Lassaad Lachaal ne s'en est pas caché: «Je reconnais que je ne suis pas expert en la matière, mais si l'on fait confiance aux résultats préliminaires des investigations, il semble qu'il ne s'agit pas d'un accident naturel, de quelque chose de spontané... Tout de même, que le feu ait éclaté dans le même temps à partir de 6 ou 7 foyers peut légitimement paraître étrange. Attendons de voir la conclusion des enquêteurs ».

Pour Samir Belhaj Salah, sous-directeur de la protection des forêts au ministère de l'Agriculture, l'origine criminelle de l'incendie est une quasi-certitude. Il étaie sa thèse par les faits que quatre ou cinq foyers de l'incendie sont très proches les uns des autres, que les plantes, arbres et arbustes du parc, en cette période de l'année, sont encore trop verts et trop tendres pour pouvoir prendre feu aussi facilement et que pareils feux n'auraient jamais pu éclater par la faute d'un mégot de cigarette jeté par inadvertance ou d'une quelconque étincelle électrique...

M. Belhaj Salah a rappelé hier, dans une déclaration à la Tap, que 50% des incendies de forêts en 2013 ont été d'origine criminelle. Ce triste constat, ajouté aux doutes que suscitent les premières observations faites sur l'embrasement du Parc d'Ennahli, fait craindre le pire, d'autant plus que, en début de semaine, un autre incendie a éclaté à Amilcar, dans la banlieue nord de la capitale...

Incendie-du-Parc-Ennahli

Plusieurs foyers de feu ont pris au même moment en plusieurs endroits.

Le nihilisme des jihadistes

Sans céder à la facilité catastrophiste, il est tout à fait plausible de croire que certaines personnes mal intentionnées auraient intérêt à semer le désordre dans notre pays qui tente de s'en sortir comme il peut. Ces actes incendiaires viseraient à porter préjudice aux efforts de notre communauté nationale qui a déjà plus d'un problème sur les bras. Ils créent la confusion, dévient l'attention et consument des énergies matérielles et humaines si précieuses en ces temps de disette.

Sans verser dans l'alarmisme gratuit, il serait fort justifié de spéculer que certaines parties qui ont recours, par ailleurs, aux armes à feu pour saboter la transition démocratique, peuvent aussi faire usage du «simple feu» pour compléter leur œuvre destructrice.

En somme, la pyromanie deviendrait ainsi une variante de l'action nihiliste du jihadisme. Cette tactique porte un nom: les experts militaires l'appellent la politique de la terre brûlée.

{flike}