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«Être homosexuel ne veut pas dire qu'on n'est pas musulman. Ainsi, il ne peut donc y avoir de chasse aux sorcières», a expliqué l'islamologue Tariq Ramadan, à Dakar, suscitant une vive controverse parmi les Sénégalais.

Par Imed Bahri

Le vendredi 5 juillet à Dakar, lors d'une séance de préparation au Colloque International Musulman dans l'Espace Francophone, Tariq Ramadan est revenu sur la question épineuse de la considération des homosexuels par la communauté musulmane.

Ce sujet a été amené alors même que l'ouverture du débat sur la dépénalisation de l'homosexualité au Sénégal avait suscité un vif débat conduisant l'ensemble des chefs religieux du pays à prendre position contre la reconnaissance de l'homosexualité au Sénégal.

Une mosquée pour les gays

Tariq Ramadan a expliqué: «Tous les savants sont unanimes sur la question. L'Islam interdit l'homosexualité, à l'instar de toutes les religions monothéistes. Mais être homosexuel ne veut pas dire qu'on n'est pas musulman. Ainsi, il ne peut donc y avoir de chasse aux sorcières.»

L'évocation de la possibilité d'être homosexuel et musulman par le théologien suisse tranche nettement avec la manière dont sont perçus les homosexuels dans la plupart des pays musulmans et plus particulièrement au Sénégal (pays dont la population est musulmane à plus de 90%) et où le délit d'homosexualité conduit à une peine de 1 à 5 ans de prison et à payer entre 400 et 4.000 dinars tunisiens d'amende.

La position adoptée par Tariq Ramadan à Dakar rappelle celle que le théologien avait développée dans l'émission ''Hondelatte dimanche'', le 16 mai dernier, face à Ludovic-Mohamed Zahed, imam de la première «mosquée» destinée aux homosexuels et à un auditoire ayant pris acte de l'adoption de la loi sur le «mariage pour tous» en France.

Ainsi, selon lui, «dire que l'homosexualité n'est pas acceptée en islam ne veut pas dire condamner la personne. Je respecte qui vous êtes (à Ludovic-Mohamed Zahed) mais je ne suis pas d'accord avec ce que vous faites. [...] Il ne devrait pas être permis à un imam ou à n'importe quelle autorité religieuse d'interdire l'entrée des homosexuels dans les mosquées».

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Ludovic-Mohamed Zahed, imam de la première «mosquée» destinée aux homosexuels en France.

Celui-que les médias français appellent souvent, à tort ou à raison, le spécialiste du double-discours a ainsi tenu la même position devant deux auditoires aux points de vue totalement opposés sur la question homosexuelle.

Traitement des homosexuels dans les pays musulmans

La thèse de M. Ramadan est actuellement minoritaire puisque, dans la quasi-totalité des pays dont la population est essentiellement musulmane, l'homosexualité est considérée comme un délit conduisant à des peines inférieures à 10 ans de prison. Cette pratique est cependant passible de la peine de mort dans 7 pays (Mauritanie, Soudan, Nigéria, Somalie, Arabie Saoudite, Yémen et Iran).

La position de M. Ramadan, bien que minoritaire actuellement, risque de susciter le débat dans les années à venir. Cela amènera peut-être une reconsidération du traitement des homosexuels par les autorités, notamment religieuses, dans les pays musulmans.