Le beau-frère de l’ex-président ne comparaitra pas dans une audience à huis-clos, comme il en a fait la demande, le 23 avril, devant le juge canadien qui statuera sur sa résidence. Le public pourra donc assister à l'audience. Il y aura même deux écrans géants pour ceux qui ne trouveront pas place dans la salle.

Par Sarra Guerchani, correspondante à Montréal


Le 13 avril, en fin de journée, Belhassen Trabelsi s’est vu refuser un huis-clos pour son audience à la Commission de l’Immigration et du Statut de réfugié au Canada (Cisr), du 23 avril prochain.

Le beau-frère de Zine El Abidine Ben Ali comparaitra devant le juge de la Commission afin de récupérer son statut de résident permanent. Le public y est convié. Kapitalis s’est procuré une copie de l’avis de décision de demande d’une audience à huis clos concernant Belhassen Trabelsi, sa femme, Zohra Jilani Trabelsi, et ses deux filles, Soufia et Zein Trabelsi.

Les médias canadiens contret les démarches de Trabelsi

Dans moins d’une semaine, Belhassen Trabelsi devra se présenter à l’audience de l’appel concernant la mesure de renvoi prise pour manquement à l’obligation de résidence dans son cas. Comme le stipule l’avis de décision, Me Norton H. Segal et Me Stéphanie Valois, sont les deux avocats québécois spécialisés en Immigration de Belhassen Trabelsi, au Canada.

Le 25 janvier 2012, ces derniers ont déposé une requête pour que la procédure devant la Section d’appel de l’immigration (Sai) soit tenue à huis- clos. Cette demande a été court-circuitée par des médias canadiens. En effet, la presse québécoise a divulgué, ces derniers mois, quelques preuves à la justice canadienne sur les antécédents de l’appelant. Les médias ont donc été considérés par la justice comme une partie intervenante et ont donc eu leur mot à dire dans la décision de la commission, par le biais de leurs avocats.

Des médias canadiens, à l’instar de Radio Canada, ont soumis des arguments écrits s’objectant à la demande de huit clos.

Manque de preuve pour un huis-clos

Après avoir pris connaissance des arguments présentés par tous les partis, la cour a décidé de refuser le huit-clos.

«Le tribunal est d’avis que l’appelant n’a présenté aucune preuve suffisante au soutien des allégations contenues dans sa demande de huis clos pour démontrer qu’un des critères énoncés à l’article 166 b) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (Lipr) trouve application».

Siège de la Commission au 200 boulevard René-Lévesque Ouest à Montréal. Ph. Guy Favreau

C’est ce que stipule l’avis de décision d’une demande d’audience à huis-clos. Effectivement, l’article B166 de Lipr souligne que le huis-clos est accordé à l’appelant seulement si «la vie, la liberté ou la sécurité d’une personne puisse être mise en danger par la publicité du débat».

En d’autres termes, Belhassen Trabelsi aurait dû prouver qu’en ouvrant l’audience au public il mettait sa famille et lui-même en danger. Le frère de Leila Ben Ali aurait fondé son argumentaire sur des rumeurs non fondées qui ont circulé à son arrivée au Canada en janvier 2011: «L’appelant ne s’est pas déchargé de son fardeau de démontrer qu’il était nécessaire de limiter la liberté d’expression par l’imposition de mesures restreignant la publicité des débats», stipule l’avis de décision. Car sans preuve tangible l’audience n’a aucune raison d’être restreinte.

C’est ainsi que «le tribunal rejette la demande de l’appelant pour que son audience devant la Sai soit tenue à huis-clos», indique le tribunal.

Audience ouverte au public

Le rendez-vous est donc donné à toute personne voulant assister à l’audience de Belhassen Trabelsi, le 23 avril prochain à 9h00, à la Section d’appel de l’immigration (Sai) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (Cisr). L’audience se déroulera au 200 boulevard René-Lévesque Ouest à Montréal.

Belhassen Trabelsi devra répondre aux questions du juge de la Commission de l’immigration ainsi qu’à un représentant du ministère de l’Immigration canadien, Gabriele Spina. «L’audience sera retransmise en direct sur deux grands écrans télévisés dans deux salles; l’une ouverte au public et l’autre aux médias», explique le Conseiller principal en communications à la Cisr, Robert Gervais.

D’autres informations devraient être divulguées, tout au long de cette semaine, sur le déroulement de l’audience de Belhassen Trabelsi.

Le fuyard sentirait-il la fin de son séjour au Canada?

La lettre d’excuse adressée aux Tunisiens, que Belhassen Trabelsi, à transmise à la presse tunisienne par le biais de son avocat Mohamed Hedi Lakhoua, le 12 avril dernier, serait donc une sorte de tentative pour préparer le terrain de son retour, en cas de refus de la justice canadienne de lui accorder un jour l’asile ou de lui redonner sa résidence permanente.

En effet, le premier jugement prononcé le 28 septembre 2011 contre lui par un tribunal tunisien le condamnant à 15 ans et deux mois de prison pourrait remettre en cause son statut au Canada: «Ces accusations peuvent avoir de lourdes conséquences sur sa demande d’asile», expliquait Maître Vincent Valai, avocat spécialisé en immigration et en droit international, dans un entretien accordé à Kapitalis, le 4 avril 2012.

Nombreux ceux qui auraient pensé que la lettre d’excuse de Belhassen Trabelsi était de bonne foi, qu’il ne se présenterait pas à son audience du 23 avril prochain, à Montréal, et donc quitterait le Canada pour aller se faire juger devant la justice tunisienne: «S’il veut agir de bonne foi, il ne doit pas se présenter à l’audition du 23 avril 2012 au Cisr qui vise dans son cas à conserver sa résidence permanente canadienne et quitter le territoire», explique à Kapitalis Me Vincent Valai.

Belhassen Trabelsi renoncera-t-il à son appel? A-t-il eu son d’un changement dans la politique tunisienne d’aujourd’hui? Ou a-t-il reçu des assurances quant à son traitement par les autorités tunisiennes, qui lui permettrait d’écrire une telle lettre d’excuse, afin de protéger ses arrières ?

Lundi prochain, les choses devraient être plus claires concernant son dossier d’extradition. En attendant, rien ne prouve que la lettre a bel et bien été écrite par le beau-frère du président déchu, même si sa signature figure en bas de la page. Si ce courrier s’avère être vrai, «il serait intéressant que les tribunaux et le gouvernement Canada en reçoivent une copie», réplique l’avocat québécois, émettant des réserves sur l’authenticité de la lettre.

Sa tentative de demander à la justice canadienne un huis-clos devant la Cisr, Belhassen Trabelsi démontre qu’il n’est pas aussi prêt à affronter la justice et le peuple tunisiens qu’il le disait dans son courrier.

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