«Pour l’intérêt de la Tunisie, Ettakatol doit contribuer au gouvernement et il sera vigilant avec ses partenaires. Nous appelons les indécis à prendre leur décision et à se joindre à ce gouvernement d’intérêt national».

Par Zohra Abid


 

C’est par ces propos que Mustapha Ben Jaâfar a lancé un appel lors d’une conférence de presse, mardi à Tunis, à tous les partis de gauche, de droite et autres pour se rassembler dans un gouvernement pour sauver le pays.

L’heure est au sauvetage

«Il y a ceux qui ont cru que ça y est, la Tunisie est déjà dans la démocratie et qu’il est de leur droit d’être dans l’opposition. Je leur dis : non, la Tunisie passe par une période très difficile. Elle n’a même pas rédigé sa constitution pour qu’on parle de démocratie. Le jour où notre pays sera vraiment inscrit dans la démocratie, il y aura un gouvernement et une opposition», a martelé M. Ben Jâafar après avoir rendu hommage aux martyrs de la révolution, aux blessés, aux militants d’hier et d’aujourd’hui, aux administrations, à l’armée, aux forces de l’ordre, à l’Isie, à toutes les instances et à la société civile qui ont été derrière le succès des premières élections libres et démocratiques. Et de signaler à ceux qui l’ont oublié que le nouveau gouvernement à mettre en place sera de transition et ne durera qu’une année. Et que le pays vient de sortir d’une révolution avec tous ses dégâts, et qu’il traverse une crise. «La croissance est quasiment nulle, tout le monde doit participer à la reconstruction du pays et à le mener à bon port», souligne le chef du Fdtl.

Ce que Dr Ben Jaâfar craint le plus aujourd’hui, ce n’est pas la montée de l’obscurantisme, mais la contre-révolution. «Nous savons qu’il y a des forces de l’ancien régime qui rôdent encore et veulent empêcher la transition. Jusque-là, elles ont perdu.

Mais soyons vigilants», a-t-il prévenu. Et de rassurer que le mur de la peur est tombé. «Nos n’avons plus peur. Ni des forces de l’ancien régime ni des idéologies. Ben Ali a mis en place une théorie : le Tunisien a peur du Tunisien et l’étranger du Tunisien. Ceci est terminé. Nous n’avons pas d’ennemis. Mais des concurrents.», a-t-il affirmé.

Ettakatol une locomotive de rassemblement

Selon le conférencier, l’heure est à la réalisation des objectifs de la révolution, à l’instauration de la justice sociale, à la répartition égale des richesses, à prendre par la main les pauvres et les chômeurs, à se rattraper avec les régions marginalisées. «Ettakatol, qui s’est placé dès le début du côté du peuple, a décidé, peu importe les difficultés, d’être loyal, de répondre aux attentes de ce peuple qui compte sur lui. Aujourd’hui, notre parti est une force dans la carte politique, crédible et tout le monde peut compter sur ses principes qui se basent sur l’éthique du travail politique, sur l’identité et sur la modernité. Tout ceci fait d’Ettakatol une locomotive pour rassembler les forces modernistes et conduire le pays vers la stabilité», a encore dit M. Ben Jaâfar.

La Tunisie est pour tous les Tunisiens et elle restera au-dessus de tout. «Il n’y a pas une logique de majorité qui gouverne et de minorité qui critique. Nous représentons le peuple, nous devons défendre ses intérêts», a estimé le médecin. Car, selon lui, la Tunisie passe par une période critique et cela exige de toutes les forces de se rassembler. «Nous devons savoir comment nous allons faire pour nous en sortir. Si nous voulons défendre le peuple qui nous a donné sa confiance», a-t-il expliqué. Et d’interpeller les leaders des autres formations pour leur rappeler leur responsabilité historique. «Nous tenons plus que jamais aux acquis sociaux, aux libertés et au statut de la femme. Nous tenons à les renforcer. La dignité revendiquée par le peuple sera dans la constitution d’une manière ou d’une autre. Nous devons défendre les pauvres, et améliorer leur niveau social. Rien de tout cela ne serait fait sans la sécurité, primordiale pour faire tourner la roue de l’économie, avoir la confiance des investisseurs d’ici et de l’étranger», a-t-il rappelé. «Il ne faut pas oublier que c’est la première fois que le peuple veut et qu’il a eu gain de cause. Il a réalisé ce qu’il a voulu. Pour la première fois, la voix du peuple est sortie des urnes sans falsification. Mettons notre pays sur les rails de la modernisation et de la démocratie. Ceci est un appel à tout le monde pour consolider ce projet. Nous devons concrétiser le changement. Nous devons être tous ensemble».

La Tunisie peut être musulmane et moderniste

A ceux qui ont proposé que le gouvernement soit confié à des technocrates, M. Ben Jâafar a répondu : «Dans les partis, il y a des militants technocrates capables de diriger le pays. Notre présence dans le gouvernement nous donnera la possibilité d’initier le changement et de contrôler les pratiques de quelques partis», a-t-il lancé. Car, selon lui, il ne faut pas perdre du temps à se chamailler. «La force ne réside pas dans le nombre des sièges que nous contrôlons. Nous avons besoin de tout le monde pour rebâtir la Tunisie. Et pas la peine de jeter de l’huile sur les feux. Il s’agit d’une épreuve difficile. Le monde nous regarde et nous devons montrer que la Tunisie peut être à la fois musulmane, démocrate et moderniste», a-t-il rassuré.

Evoquant Ennahdha, parti que certains accusent de double langage, le secrétaire général d’Ettakatol a dit que ses leaders tiennent un discours modéré et cohérent. Ils doivent maintenant le mettre en pratique. «Nous allons voir comment ils vont se comporter dans les discussions à propos de la constituante. Mais arrêtons les discours de division, qui opposent croyants et athées. Partout dans le monde, il existe des courants sociaux, libéraux ou conservateurs et c’est ça la démocratie. Mais la campagne électorale est finie. Nous devons nous tourner vers un gouvernement d’intérêt national. Ni fronts ni pôles ni coalitions qui s’affrontent. Notre but est le rassemblement. Pour ceux qui ont perdu, c’est normal, c’est comme dans un match de foot ou de compétition sportive, on a perdu, on avale la pilule, on passe à l’analyse, puis on avance et ce n’est pas la fin du monde», a-t-il plaidé.