Ahmed Mestiri, fondateur et ancien président du Mouvement des démocrates socialistes (Mds), est intervenu hier sur la chaîne Al-Jazira pour se féliciter publiquement de la révolution tunisienne. Ridha Kéfi


C’est la première intervention publique de cet homme politique d’envergure depuis son retrait de la scène en 1989. Evénement important s’il en est, et qui ne doit pas passer inaperçu.   
Ancien ministre, respectivement, de la Justice, de l’Intérieur et de la Défense, sous Bourguiba, qui a rompu avec l’ancien parti unique, le Parti socialiste destourien (Psd), pour passer dans l’opposition et créer, en 1979, le Mouvement des démocrates socialistes (Mds).

Homme intègre, pondéré et de grande expérience
Grand militant pour la démocratie et les droits de l’homme, cet avocat tunisois a été de tous les combats contre l’autoritarisme bourguibien et pour l’avènement d’une société pluraliste et démocratique. Il a démissionné du Mds en 1989 et s’est retiré de la vie politique, refusant de participer à la mascarade de la démocratie unanimiste mise en place par Ben Ali.
Aujourd’hui, cet homme intègre, pondéré et de grande expérience politique peut être d’un grand apport au processus de reconstruction politique en cours depuis la chute de la dictature de Ben Ali.
Je m’étonne, personnellement, que les figures de l’opposition, dont la plupart étaient ses disciples et compagnons de combat, et qui s’empressent actuellement à se répartir les portefeuilles ministériels dans le gouvernement d’union nationale, n’ait pas pensé faire appel à cet homme, ne fut-ce que pour écouter ses conseils et puiser dans son expérience des éléments susceptibles d’aider à la reconfiguration des institutions républicaines de notre chère Tunisie.
Dans son intervention à Al-Jazira, Ahmed Mestiri a déclaré, en réponse à une question sur son possible retour au travail politique: «J’ai 86 ans. Je n’ai pas d’ambition présidentielle ou ministérielle».

Un oubli impardonnable
Le désintéressement d’Ahmed Mestiri, son humilité et son effacement volontaire ne sauraient justifier notre indifférence à son égard, surtout en ce moment historique, qui est le couronnement d’un long combat initié par lui et mené avec une abnégation jamais démentie.
Ahmed Mestiri, juriste de formation, avocat et ancien ministre de la Justice, est l’une des personnalités tunisiennes les mieux placées pour présider la commission d’enquête sur la corruption et les abus des responsables publics que le gouvernement a promis de constituer. Il pourrait aussi être d’un grand apport aux travaux de la Commission sur les réformes politiques, dont la présidence vient d’être attribuée à Iyadh Ben Achour.
De grâce, ne commettons pas l’erreur, impardonnable au regard de l’Histoire, de ne pas solliciter la contribution de cet homme à la reconstruction de la scène politique tunisienne!