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Le CEAE, un think tank européen, rappelle «l'intérêt immense que l'Union européenne a à ce que l'expérience tunisienne réussisse».

Par Marwan Chahla

Le Conseil européen des affaires étrangères (CEAE), un think-tank pan-européen vient de publier les résultats d'une étude qu'il a menée sur la transition en Tunisie, dans laquelle il insiste notamment sur l'obligation pour l'Union européenne (UE) de faire preuve de plus d'engagement dans son soutien au processus démocratique tunisien.

Le CEAE a rendu publics, lundi 20 octobre 2014, les résultats d'un travail de recherche sur le processus de démocratisation en Tunisie. Ce compte-rendu, d'une quinzaine de pages, met notamment l'accent sur l'importance des élections législatives tunisiennes du dimanche 20 octobre 2014, les qualifiant d'«avancée significative pour le pays sur la voie de la transition, à un moment où les espoirs de réforme démocratique dans les autres pays des soulèvements du Printemps arabe de 2011 ont été déçus».

Eviter la polarisation

Ce document, rédigé par Anthony Dworkin, chercheur principal auprès du CEAE, devrait en principe servir de référence pour l'UE dans la conduite de ses relations avec la Tunisie.

Dans son rapport stratégique, intitulé «Les élections en Tunisie et la consolidation de la démocratie», l'expert du CEAE indique qu'afin de renforcer le processus démocratique en Tunisie, au lendemain des prochaines élections, le pays aura besoin d'être soutenu pour faire face à d'autres défis.

Le document d'orientation envoie un message clair et direct à la classe politique tunisienne sur la manière dont «elle va devoir démontrer sa capacité à pouvoir former un gouvernement efficient et à l'obligation qu'elle aura aussi d'éviter la polarisation qui, l'année dernière, a failli saborder toute le processus transitionnel. Ils (les dirigeants politiques tunisiens, NDLR) devront également donner la preuve que ce gouvernement est à même de prendre à bras-le-corps les problèmes économiques du pays et qu'il est en position de force pour faire face aux menaces à sa sécurité, de façon à ce que le peuple tunisien n'ait pas le sentiment que la démocratie n'a fait que rendre ses conditions de vie plus difficiles».

Anthony Dworkin met en garde contre le danger d'un faible taux de participation qui menace le scrutin de dimanche prochain. Pour lui, pareil comportement de l'électorat tunisien représenterait «un avertissement que la désaffection des citoyens tunisiens à l'égard de la chose politique et des politiciens a gagné du terrain en Tunisie et que la Révolution est entrain de perdre de sa vigueur».

Contre ce danger de l'essoufflement révolutionnaire et le risque d'échec qui pourrait s'en suivre, l'expert du CEAE recommande que soit mis en œuvre immédiatement, au lendemain des élections législatives du 26 octobre 2014, «un ensemble de réformes fondamentales de l'administration publique, des forces de sécurité et de l'appareil judiciaire, de manière à donner suite aux aspirations de la Révolution et à faire échec à toutes les résistances potentielles au changement».

Donner la priorité au soutien de la Tunisie

Le CEAE rappelle aussi «l'immense intérêt que l'Union européenne a à ce que l'expérience tunisienne réussisse». Anthony Dworkin conseille notamment à ce que le grand voisin européen révise de fond en comble sa politique méditerranéenne, de telle sorte que, désormais, la priorité soit donnée au soutien de la Tunisie, en:

- s'assurant que les décisions économiques immédiates n'aient pas d'impact négatif sur les catégories sociales les plus fragiles;

- aidant de manière plus responsable la Tunisie à combattre le terrorisme;

- redoublant les efforts en matière de promotion des échanges dans le domaine de l'éducation et autres;

- développant les investissements afin de créer des emplois et améliorer les services;

- et en offrant soutien et coopération dans l'entreprise de la réforme de l'Etat tunisien.

Anthony Dworkin conclut son document en indiquant cet autre passage obligé que la Révolution tunisienne devra également emprunter: «C'est seulement en inculquant la volonté de changement réel à la veille garde, qui continue d'occuper les institutions de l'Etat, que la Tunisie sera capable de concrétiser les aspirations qui ont poussé le peuple tunisien à la révolte».

Ainsi, semble-t-il, la feuille de route du nouveau partenariat tuniso-européen est élaborée et détaillée. Anthony Dworkin et son CEAE ont déblayé le terrain, et la Tunisie et l'UE, placées devant leurs responsabilités, savent ce qui leur reste à faire...

La pleine conscience des enjeux et la volonté politique sincère, de part et d'autre, de donner une forme concrète aux déclarations de principes entameront, poursuivront et finaliseront les «beaux» projets tuniso-européens.

Lire le rapport en anglais. 

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