rcd degage
Notre collègue Abdeljelil Messaoudi, membre de longue date de l’ancien parti au pouvoir, a déclaré à ‘‘Libération’ que les Tunisiens n’ont le choix qu’entre les islamistes et… le Rcd.


Cet ancien partisan de l’ancien Premier ministre Mohamed Mzali, devenu «benaliste» après l’accession de l’ex-dictateur à la tête du pays, était en charge des relations extérieures du Rassemblement constitutionnel démocratique (Rcd) de 2001 à 2003. Il a cependant continué à officier au sein de ce parti sous le statut de détaché du journal gouvernemental ‘‘La Presse’’, jusqu’à il y a récemment.

Courage, fuyons!
M. Messaoudi, qui avait aussi prêté ses services à l’Agence tunisienne de communication extérieure (Atce), a également travaillé au consulat tunisien à Strasbourg. Sa tâche principale: contrer les Sihem Ben Sedrine, Khémaîes Chammari,  Radhia Nasraoui, Taoufik Ben Brik et autres Souheir Belhassen, opposants et militants des droits de l’homme tunisiens, qui étaient invités à intervenir auprès du Parlement européen. Autre tâche, dont il s’est toujours acquitté avec ferveur: soudoyer des journalistes mercenaires français, à l’instar d’un certain François Bécet, ex-rédacteur à ‘‘L’Alsace’’ devenu correspondant en France du ‘‘Quotidien de Tunisie’’, aujourd’hui dirigé par le même Messaoudi.
Ce François Bécet est l’auteur d’un livre de propagande, ‘‘Ben Ali et ses faux démocrates’’ édité en 2004 aux frais de l’Atce, qui en assuré la promotion et la distribution en Tunisie et en France. Idem pour son second ouvrage lèche-botte, ‘‘Tunisie : porte ouverte sur la Méditerranée’’, préfacé par un autre mercenaire de Ben Ali, l’inévitable Antoine Sfeir, publié en 2010.
Des traces de ces opérations, payées par les contribuables tunisiens, devraient exister dans les archives de l’agence, qui seront sans doute examinées par la commission d’enquête sur la corruption.
Ce même Messaoudi, devenu patron de presse à la faveur de son second mariage avec Saïda El Amri, veuve et héritière de Slaheddine El Amri, fondateur de Dar Anwar (‘‘Echourouq’’, ‘‘ Le Quotidien’’ et ‘‘Al-Anwar’’), explique aujourd’hui, très courageusement, à ‘‘Libération’’ n’avoir eu aucune responsabilité dans le parti, qu’il dit avoir quitté en 2009. Et de se retourner, tout aussi courageusement, contre celui qu’il avait servi, 23 ans durant, avec un zèle renouvelé. «Avec Ben Ali, qui a repris la structure dans le Rcd, le parti a été infiltré par la police puis, à partir des années 2000, par la mafia familiale. Il a servi à blanchir les fortunes des Trabelsi et des autres. C’est ce qui a fini par le perdre», a-t-il déclaré à ‘‘Libération’’.

Le Rcd sinon les islamistes!
Cette conscience retrouvée, un peu trop tardivement il est vrai, aurait été crédible si le journaliste s’était contenté de faire son mea culpa. Non M. Messaoudi reste attaché à «son» Rcd, au point de ne pas voir d’avenir pour la Tunisie sans sa lourde et écrasante tutelle. «Mais au final, qu’est-ce qui peut structurer la société? L’islam ou le Rcd, c’est tout. Or, on ne veut pas que l’islam soit le cadre de cette société.», a déclaré M. Messaoudi.
En d’autres termes: les Tunisiens n’ont pas le choix. Ils doivent accepter d’être gouvernés par le Rcd, le parti qu’ils abhorrent et dont ils appellent la dissolution, au risque de devoir subir le joug des islamistes. La même rengaine, en somme, que lui et ses anciens employeurs ont servi au monde entier 23 ans durant. On connaît la suite…

Zohra Abid