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Le dixième Conseil d'association UE-Tunisie, tenu lundi à Luxembourg, a été inexplicablement boudé par Mongi Hamdi, ministre des Affaires étrangères.

Par Wajdi Khalifa (avec communiqué).

Le Conseil, tenu en marge du Conseil Affaires étrangères de l'Union européenne (UE), a été présidé par le vice-ministre grecque des Affaires étrangères, Dimitris Kourkoulas au nom de Catherine Ashton, Haute représentante de l'UE pour la Politique extérieure et de Sécurité commune et vice-présidente de la Commission européenne. La Commission européenne était représentée par Štefan Füle, Commissaire à l'Elargissement et à la Politique de voisinage. Le service européen pour l'action extérieure était représenté par Bernard Savage, chef de division Maghreb.

Une participation tunisienne a minima

La délégation tunisienne était présidée par le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, Fayçal Gouia. Le ministre des affaires étrangères Mongi Hamdi, qui a brillé par son absence, était à Tunis pour... une audience avec l'ambassadeur indonésien, selon la page Facebook officielle du ministère. Cette audience était-elle aussi urgente pour que le chef de la diplomatie tunisienne sèche le e 10e Conseil d'association Tunisie-UE? A moins que la partie tunisienne n'ait voulu exprimer, indirectement, par cette présence à minima, son insatisfaction de l'évolution des relations avec le partenaire européen. Et, notamment, de l'adoption, le 8 avril, par la Commission européenne d'un règlement d'exécution établissant de nouvelles valeurs forfaitaires à l'importation pour la détermination du prix d'entrée de certains fruits et légumes en provenance de pays tiers, dont la Tunisie.

Ce règlement, qui renforce les conditions d'entrée des fruits et légumes dans l'UE risque, en effet, d'entraver les exportations agricoles tunisiennes vers ce marché.

Cette question du commerce des produits agricoles a, d'ailleurs, été soulevée par la partie tunisienne. Le secrétaire d'Etat l'a notamment mentionnée dans la conférence de presse (Vidéo).

Faysal-Gouia-Conseil-association-Tunisie-UE

Le secrétaire d’état tunisien aux Affaires étrangères, Fayçal Gouia, et l'ambassadeur tunisien auprès de l'UE et la Belgique et le Luxembourg Tahar Cherif.

Plan d'action du Partenariat privilégié

Le Conseil a donné l'opportunité de sceller un accord politique sur le Partenariat privilégié entre la Tunisie et l'UE, concrétisé par le nouveau Plan d'action et sa matrice identifiant les actions prioritaires jusqu'en 2017. Le Plan d'action du Partenariat privilégié offre une feuille de route traduisant la volonté de la Tunisie de développer les réformes dans tous les domaines.

Le Conseil d'association a permis aux deux parties de faire le bilan des réalisations accomplies, de passer en revue les étapes à venir et d'échanger sur les développements en Tunisie et dans l'UE, de même que sur les questions régionales d'intérêt commun.

Pour sa part, la partie tunisienne a rappelé les derniers développements politiques et institutionnels positifs directement liés à l'adoption de sa nouvelle Constitution. Elle a passé en revue les étapes électorales à venir et a insisté sur l'importance de renforcer les relations bilatérales, entre autre via la mise en œuvre du Partenariat privilégié avec l'UE. La Tunisie a également mis en avant ses attentes vis-à-vis de l'UE en termes de soutien politique et économique, ainsi que ses priorités en matière de commerce et de mobilité.

L'UE a, de son côté, réitéré ses félicitations à la Tunisie pour la mise en place d'un dialogue national inclusif ayant permis l'adoption d'une nouvelle Constitution moderne et démocratique, la nomination d'un nouveau gouvernement de transition et une série de développements institutionnels permettant de consolider le processus de transition dans son ensemble.

Plein appui à la transition politique

L'UE a confirmé son plein appui à la transition en soulignant l'importance de mettre en œuvre la nouvelle Constitution et consolider la protection des droits de l'Homme, des libertés fondamentales et de l'État de droit.

L'UE reconnait les importants défis socio-économiques (disparités sociales et économiques entre les régions, chômage élevé des jeunes) et sécuritaires (terrorisme, radicalisation, crime organisé, trafics transnationaux) auxquels la Tunisie fait face et l'a assuré de son soutien croissant.

L'UE reste convaincue que les perspectives économiques et sociales de la Tunisie dépendent largement de l'évolution de la transition politique, de la consolidation de ses institutions et de son secteur bancaire, de la modernisation de la gestion des finances publiques, mais aussi de l'adoption de réformes structurelles, qui nécessite la poursuite du dialogue entre les partenaires sociaux.

A cet égard, l'UE a souligné notamment le rôle essentiel de la société civile dans la réussite de la transition. Enfin, elle a réitéré son offre d'une intégration progressive de la Tunisie dans le marché intérieur européen, d'une relance des négociations de libéralisation du commerce agricole et aérien et d'un soutien accru aux petites et moyennes entreprises à travers la participation de la Tunisie aux programmes de l'UE et à travers des initiatives en faveur de l'entreprenariat.

Ce Conseil d'association a aussi été l'occasion de rappeler que l'offre européenne concerne aussi l'amélioration des conditions de mobilité pour les citoyens européens et tunisiens à travers la mise en œuvre du partenariat pour la mobilité dont la déclaration politique a été signée le 3 mars dernier.

Reconnaissant les inquiétudes exprimées par la société civile tunisienne, l'UE a rappelé son engagement à répondre d'une manière responsable, globale et équilibrée à tous les aspects du phénomène migratoire, sans obsession sécuritaire, tout en fournissant un cadre coordonné de coopération avec les 10 Etats membres qui s'engagent aux côtés de la Tunisie pour faire de ce partenariat un succès.

L'UE a présenté aux autorités tunisiennes le nouvel instrument financier d'aide aux pays du voisinage (ENI) dont bénéficiera la Tunisie dans le cadre du nouveau cadre financier pluriannuel 2014-2020.

L'UE a rappelé que l'assistance à la Tunisie avait quasiment doublé depuis 2011 dans le cadre du précédent instrument de voisinage pour atteindre 485 millions d'euros (m€), dont 60% sous forme d'appui budgétaire.

Par ailleurs, la Tunisie est le premier bénéficiaire du programme Spring consacré à l'appui aux pays en transition.

L'UE a enfin rappelé que pour aider la Tunisie à faire face à ses défis macro-économiques, le Parlement européen était sur le point de voter une aide macro-financière substantielle de 300m€ sous forme de prêts aux conditions très avantageuses (cette aide étant étroitement coordonnée avec celle récemment décidée par le FMI).

Enfin, ce Conseil d'association a permis de lancer la procédure d'adoption de deux protocoles additionnels à l'Accord d'association entre l'UE et la Tunisie en ce qui concerne, d'une part, l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, et d'autre part, un accord cadre ouvrant l'accès de la Tunisie aux programmes et agences de l'UE.

 

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Illustration: le secrétaire d’état tunisien aux Affaires Etrangères, Fayçal Gouia, le ministre grec des Affaires étrangères Dimitris Kourkoulas, le commissaire Stefan Füle.