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Avant de décider d'inscrire Ansar Charia sur la liste des organisations terroristes, le gouvernement Ennahdha a entretenu des relations organiques avec les dirigeants de ce groupe violent, et avec ses protecteurs libyens.

Par Imed Bahri

Taïeb Laaguili et Nizar Senoussi, membres de l'Initiative pour la recherche de la vérité sur l'assassinat de Chokri Belaid (IRVA), ont fait de nouvelles révélations, au cours d'une conférence de presse, mercredi, à Tunis, sur les complicités – actives ou passives – des autorités sécuritaires dans les assassinats de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, attribués à des éléments d'Ansar Charia.

Les amis tunisiens de Abdelhakim Belhaj

Les deux conférenciers ont également levé le voile sur des relations pour le moins troubles entre Ansar Charia, le groupe présumé terroriste d'Abou Iyadh, et certains dirigeants d'Ennahdha, ainsi qu'avec des dirigeants terroristes libyens planifiant des attentats en Tunisie.

MM Laaguili et Senoussi ont présenté des documents et des photos prouvant, entre autres, des relations entre le chef terroriste libyen Abdelhakim Belhaj et des dirigeants du gouvernement et du parti Ennahdha au pouvoir.

Abdelhakim Belhaj, rappelons-le, est un ancien membre du réseau terroriste Al-Qaïda en Afghanistan. Il a été arrêté et emprisonné à Guantanamo au lendemain des attentats du 11 septembre 2011 à New York. Libéré et livré à la Libye de Mouammar Kadhafi, il a passé quelques années en prison avant d'être libéré après la chute de l'ex-dictateur. Il a d'ailleurs pris une part active, avec ses groupes de jihadistes, à la libération de la ville de Tripoli.

C'est ce même Abdelhakim Belhaj qui offre aujourd'hui l'hospitalité à Abou Iyadh, le chef du groupe terroriste Ansar Charia, et à de nombreux salafistes jihadistes tunisiens, qu'il entraîne dans des camps, dans la région de Benghazi (ouest de la Libye), avant de les envoyer sur les fronts du jihad au Mali, en Syrie... mais aussi en Tunisie.

Tapis rouge pour un terroriste

Dans une note, datée du 4 janvier 2013, le directeur général de la Sûreté nationale de l'époque, Wahid Toujani, alertait ses services sur l'entrée de Abdelhakim Belhaj en Tunisie, de manière clandestine, et leur donnait des instructions pour l'arrêter. Le responsable sécuritaire a insisté dans sa note sur la dangerosité de l'homme, ancien prisonnier à Guantanamo impliqué dans l'attentat de Madrid, le 11 mars 2004, qui serait en train de préparer des actes terroristes en Tunisie, avec l'aide d'islamistes extrémistes locaux.

Cela n'a pas empêché Abdelhakim Belhaj de débarquer à Tunis, en ce début janvier 2012, soit un mois avant l'assassinat de Chokri Belaïd, officiellement pour des soins de santé dans une clinique des Berges du Lac à Tunis. De hauts responsables du gouvernement et du parti Ennahdha (au pouvoir) lui ont rendu visite pour s'assurer qu'on s'occupe bien de lui et lui ont même rendu hommage à l'occasion de la célébration du 1er anniversaire de la révolution tunisienne, le 14 janvier 2012.

Parmi les responsables du gouvernement et d'Ennahdha ayant rencontré Abdelhakim Belhaj au cours de ses nombreux séjours en Tunisie, MM. Laaguili et Senoussi ont cité l'ex-du chef du gouvernement Hamadi Jebali, le président d'Ennahdha Rached Ghannouchi, le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle Samir Dilou, le secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires sociales chargé des Migrations et des Tunisiens à l'étranger, Houcine Jaziri, ainsi qu'un certain Mosbah Bchiri, militant d'Ennahdha habitant à Ben Guerdane, près de la frontière libyenne.

Il convient cependant de préciser ici qu'en réaction à ces accusations, Samir Dilou a déclaré, à Mosaïque FM, n'avoir jamais rencontré Abdelhakim Belhaj.Il n'a cependant pas écarté la possibilité que d'autres dirigeants d'Ennahdha aient pu rendre visite à ce dernier lors de son séjour en Tunisie.