Donia Chaouch, nommée officiellement, lundi, à la tête de la radio publique Rtci, n’a pas manqué de faire parler d’elle durant la semaine passée. Et pour cause: conflits internes et clashs en live.

Par Thameur Mekki


La grille de programmation estivale de Radio Tunis Chaîne Internationale (Rtci) a commencé, dimanche 1er juillet. A partir de lundi, les auditeurs de cette radio multilingue ont remarqué un nouvel intitulé de la matinale : ‘‘Réveil Malin’’. Mais ce n’est pas tout. La rubrique ‘‘Café Noir’’, animée par Nadia Haddaoui, a changé de titre. Désormais, c’est ‘‘L’invité du journal’’. Quant à ‘‘Chocolat chaud’’, animée par Najoua Zouhair, elle n’est plus au programme. Ni la rubrique, ni l’animatrice, d’ailleurs. Rien d’une surprise. La jeune femme avait suscité la polémique depuis 10 jours.


Najoua Zouhair: le délit de rire.

Pas de ‘‘Chocolat chaud’’ en été !

«‘‘Chocolat chaud’’ sur Rtci se voit contraint et forcé de s’arrêter. Aucun compromis n’est possible lorsqu’on vous somme de changer le nom de l’émission pour le mois de Ramadan parce qu’un titre à connotation gastronomique risque d’offenser les auditeurs qui font le jeûne», a écrit Najoua Zouhair sur sa page Facebook, le 23 juin.

Une brise d’ultra-conservatisme souffle-t-elle sur cette radio multilingue? Donia Chaouch, directrice par intérim de Rtci avant d’être nommé, lundi, à la tête de ce média public, nie catégoriquement qu’il s’agit d’«une décision imposée d’en haut». «Le changement des titres des émissions sont une simple modification relative à la grille estivale» affirme Mme Chaouch. «Ce n’est tout-de-même pas cohérent d’offrir un chocolat chaud dans cette canicule. Il vaut mieux une citronnade, par exemple», poursuit-elle sur un ton satirique, avant d’ajouter: «En plus, Ramadan s’approche. Il vaut mieux trouver un intitulé plus approprié».

Libre arbitrage du PM et de sa déléguée

Mais la question du changement de l’intitulé de l’émission n’est que la partie émergente de ce petit iceberg. Najoua Zouhair écrit sur Facebook, le 24 juin: «Je fais mon émission depuis plus de 9 mois avec succès et ma directrice n’a jamais tari d’éloge sur mon travail. Ensuite, on me dit que ‘‘si je veux’’ je peux garder l’émission en plus du travail aux news». Et elle indique que cette nouvelle fonction «nécessitera une présence de 6h par jour, 6 jours sur 7 ce qui ne lui laissera plus le temps de préparer Chocolat chaud». Mme Zouhair ajoute à titre hypothétique : «A ce moment-là, il faudra changer le titre juste pour le mois de Ramadan parce que ça risque de gêner. Indépendamment du fait que je sais pertinemment que je ne serais pas payée double».


Donia Chaouche, scandalisée et droite dans ses bottes.

De son côté, Donia Chaouch explique: «Nous avons eu besoin de plus d’effectif pour la rédaction du journal parlé en français vu que trois journalistes sont tombées enceintes». Ensuite, elle renchérit: «Le Premier ministère (PM) ne nous a pas autorisé de nouveaux recrutements. On nous a demandé de faire recours aux détachés du Renouveau [organe de presse du Rcd, Ndlr] affectés à Rtci. (…) Et c’est ce que nous avons décidé de faire». Nolens volens, les instructions du Premier ministère ont fini par trancher, comme au sale vieux temps.

«Café noir» avec Bendir Man, podcast censuré

Le conflit ne s’est pas limité aux bureaux de Rtci et aux pages du réseau social. Invité de ‘‘Café noir’’, dans son numéro du lundi 25 juin, Bendir Man a usé de satire en revenant sur les révélations de Najoua Zouhair. «Si je verrais une machine à laver dans une pub en affichage urbain, je vais me mettre à faire la lessive dans la rue», nous rapporte-t-il, citant l’une de ces répliques satiriques durant l’émission. Pourquoi nous raconte-t-il son passage? C’est tout simplement parce que le podcast de l’émission n’a pas été mis en ligne. «Nous ne mettons pas systématiquement les podcasts sur notre portail», affirme Donia Chaouch. Or, en ce qui concerne ‘‘Café noir’’, les podcasts ont toujours été uploadé sur le site web de Rtci.


Bendir Man: celui par qui le scandale arrive.

La directrice évoque les raisons de la non-publication de l’émission. «Il a insulté le président de la république et des membres du gouvernement. Je ne pouvais pas tolérer que cela se passe avec la complicité de l’animatrice qui se contentait de rire», déclare Donia Chaouch. Bendir Man raconte sa version des faits: «Je n’ai insulté personne. Il semble que celui qui vous a raconté mon passage confond satire et ironie».

Qui a annoncé la chute de Bendirland?

La directrice a, donc, pris la situation en main, fait irruption dans le studio en live et pris la parole. «C’est un droit de réponse pour réagir aux propos mensongers de Bendir Man et remettre de l’ordre dans l’émission. D’ailleurs, j’ai demandé l’autorisation au directeur général de l’Etablissement de la radio nationale», précise Mme Chaouch.

Le bémol? Cet acte est un dépassement des règles du métier et une atteinte à la déontologie journalistique. Le droit de réponse ne devrait pas être accordé par les directeurs des médias mais plutôt par les rédacteurs en chef. Sorti du studio, Bendir Man nous raconte qu’il a été confronté à Adel Mothéré, animateur de Rtci, qui lançait à l’artiste satirique: «Tu n’as pas le droit de critiquer la programmation de la radio!». Sa visite à Rtci a pris fin avec une dispute. Qui a annoncé la chute de Bendirland?

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