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La société civile tunisienne va internationaliser l'affaire du journaliste Mahmoud Bouneb, ancien directeur d'Al-Jazeera Children, empêché de quitter le Qatar.

Par Zohra Abid

Cette décision a été annoncée par le comité de soutien de Mahmoud Bouneb, empêché de quitter le Qatar depuis septembre 2012, lors d'une conférence de presse tenue, aujourd'hui, au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT).

Elle a été prise suite aux reports successifs et injustifiés du procès intenté au journaliste et du refus du Qatar de remettre des visas aux membres de son collectif tunisien de défense.

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Le journaliste empêché de quitter Doha depuis septembre 2012.

L'Etat tunisien aux abonnés absents

«Au début, nous avons fait confiance aux responsables qataris et tunisiens, qui nous ont rassurés. Mais vu ce qui se passe : pas de visas accordés pour les défenseurs, un dossier vide, des reports successifs du procès sans explication aucune..., nous devons changer d'approche et mener des actions pour mobiliser la société civile», a indiqué Neji Bghouri, président du SNJT.
Il a ajouté que des contacts ont été établis avec le syndicat des journalistes marocains et d'autres associations professionnelles pour mobiliser la société civile arabe et internationale autour de cette affaire et faire pression sur le Qatar.

«Nous avons déjà informé la plupart des organisations internationales de défense des droits de l'homme, ainsi qu'Amnesty international et l'ONU, afin qu'elles interviennent elles aussi», a ajouté Néji Bghouri

Selon Mokhtar Trifi, avocat et président d'honneur de la Ligue tunisienne des droits de l'homme (LTDH), beaucoup de temps a été perdu et il convient de changer le fusil d'épaule. «J'avoue que nous avons tous failli. Et pour cause. Les autorités qataries nous ont fait des promesses, celles de la Tunisie aussi. Je pense notamment au président provisoire Moncef Marzouki. Mais rien n'a été fait. Nous devons compter désormais sur nous-mêmes pour faire libérer notre compatriote», a dit l'avocat.

«Cette séquestration du journaliste tunisien est injuste et nous n'allons pas nous laisser faire. Surtout que Mahmoud Bouneb ne demande que de retrouver la liberté de se déplacer et s'engage à retourner au Qatar à chaque fois qu'il est convoqué pour son procès», a encore expliqué Me Trifi à Kapitalis.

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Les journalistes tunisiens s'inquiètent pour le sort de leur confrère Mahmoud Bouneb séquestré au Qatar.

La dignité de l'Etat passe par celle de ses citoyens

L'avocate et militante des droits humains Saïda Garrach a appelé, de son côté, à ne plus faire confiance au Qatar. «C'est un Etat qui a, certes, beaucoup d'argent, mais qui ne respecte pas les droits de l'homme. Cet Etat, qui a fait condamner à la perpétuité un poète pour avoir écrit quelques vers d'éloge de la révolution tunisienne, est capable de tout et, surtout, du pire», a souligné Me Garrach, en passant en revue les archaïsmes et les dysfonctionnements de la justice qatarie, aux ordres du prince.

Le comité de soutien de Mahmoud Bouneb a donc lancé, aujourd'hui, un appel à la société civile pour qu'elle bouge et fasse pression sur le gouvernement de Tunis et de Doha. «Qu'on ne nous oppose pas le prétexte des intérêts économiques entre les 2 pays. Nous leur disons que la dignité du citoyen tunisien passe avant tout, car il s'agit aussi et surtout de la dignité de tout un peuple et de son Etat», a encore indiqué Néji Bghouri à Kapitalis.

L'appel lancé concerne notamment l'Union générale tunisienne de travail (UGTT), qui doit elle aussi agir et mobiliser les organisations syndicales à travers le monde. «La situation difficile de nombreux Tunisiens travaillant au Qatar requiert une réaction de la part de l'UGTT, qui ne peut rester indifférente, non plus, au sort réservé au journaliste Mahmoud Bouneb», a martelé M. Bghouri, en regrettant le nouveau report du procès de Bouneb, décidé hier, sans fixation de la date de la nouvelle audience.

«Il s'agit d'une affaire politique, car les accusations de malversations ont été rejetées par les juges et le dossier judiciaire est totalement vide», a conclu Me Trifi.

Illustration: Néji Bghouri, Saida Garrach et Abdessattar Ben Moussa.

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