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L'image de la Tunisie, qui se dégage de la lecture du ''Financial Times'', journal de référence en Europe, lu quotidiennement par 1,6 million de lecteurs, est celle d'un pays en déroute, et qui fabrique des jihadistes à grande échelle.

Par Moncef Dhambri

Il y a une semaine, le très célèbre quotidien britannique ''Financial Times'' (FT) a publié une longue analyse sur la situation en Tunisie. Cet article de Borzou Daragahi*, une grosse pointure du FT, porte le titre suivant: "North Africa wakes up to dangers of exporting jihadist threat" (l'Afrique du nord réalise enfin les dangers de l'exportation de la menace jihadiste).

Autant dire qu'il n'y a rien de bien réjouissant dans ce que M. Daragahi a écrit. Nous l'avons lu, dans la solitude de notre bureau. Nous épargnons à nos lecteurs la désagréable expérience de leur traduire ce texte.

Escalade de la violence salafiste

Ce qui a attiré notre attention, c'est que cette semaine, également, le FT récidive et enfonce encore plus le clou, dans sa rubrique du courrier des lecteurs.

Nous reproduisons, ici, un commentaire de l'article de Borzou Daragahi, rédigé par M. Francis Ghilès, maître de recherche au Cidob de Barcelone, en Espagne.

«Monsieur, Borzou Daragahi a raison d'écrire que les gouvernements n'ont pas cessé de déployer d'énormes efforts pour mettre un terme à cette déferlante de militants islamistes qui se déverse sur la Syrie. Des diplomates occidentaux en poste à Tunis peuvent le confirmer: ils estiment le nombre des militants tunisiens (jihadistes) déjà en Syrie à plus d'un millier; et il va crescendo.
Il a fallu beaucoup de temps au gouvernement d'Ennahdha pour prendre les choses plus au sérieux et faire montre de plus de fermeté à l'égard des Salafistes. Il y a eu l'assaut de l'ambassade des Etats-Unis à Tunis, en septembre dernier, l'attaque contre le siège du syndicat (Ndlr, Ugtt), en décembre, la mise à feu et à sac d'une soixantaine de zaouias soufies et l'assassinat du leader de gauche, l'avocat Chokri Belaïd, en février dernier. Cette escalade a poussé le gouvernement (Ndlr, nahdhaoui) à se ressaisir. Cependant, la plupart des coupables de ces actes restent impunis. Les assassins de Belaïd sont toujours en fuite et ont peut-être quitté le pays.

La peur envahit la Tunisie

Tant que cette impunité perdure, le fait d'évoquer la possible tenue d'élections ''libres et justes'' n'a aucun sens. Le sentiment de peur et d'appréhension qui envahit la Tunisie, notamment parmi la population féminine du pays, durera encore tant que plusieurs citoyens ordinaires n'ont pas été convaincus que leur gouvernement veuille bien faire respecter la Loi et qu'il croît sincèrement en la démocratie».

Pour rappel, le ''Financial Times'' est un quotidien économique et financier britannique, mais dont la majorité des lecteurs résident dans d'autres pays depuis 1998. Il est généralement considéré comme le quotidien économique de référence en Europe. Tiré en 2006 à plus de 400 000 exemplaires, le FT aurait environ 1,6 million de lecteurs. Il est imprimé simultanément dans 24 villes : Londres, Leeds, Liverpool, Dublin, Paris, Francfort, Stockholm, Milan, Madrid, New York, Chicago, Los Angeles, San Francisco, Dallas, Atlanta, Miami, Washington, Tokyo, Hong Kong, Singapour, Séoul, Dubaï, Johannesbourg et Istanbul**.

Cela devrait suffire, à nos lecteurs, pour estimer les dégâts qu'Ennahdha et Rached Ghannouchi ont causés depuis un an et demi de gouvernements Troïka 1 et 2.

Cela devrait suffire aux électeurs de bien réfléchir avant de glisser leurs bulletins dans les urnes, lors des prochaines législatives et présidentielles. Si élections il y aurait !

Notes:

*Borzou Daragahi est correspondant du FT pour la région Afrique du nord et Moyen-Orient.

** Source: Wikipédia