Le projet d’ouverture du ciel tunisien à la concurrence est très attendu par les professionnels du tourisme afin de sortir le secteur de sa morosité, mais le gouvernement temporise, avançant des raisons économiquement incohérentes.

Par Maher Gordah


 

L’Open sky est une des conséquences d’une politique économique qui se base sur la libéralisation des règles qui régissent le secteur aérien international. C’est une forme de dérégulation d’un secteur économique, dont la finalité est l’instauration d’une concurrence saine qui permettra une baisse progressive des prix pratiqués à travers le démantèlement d’une situation monopolistique. Cela implique donc une ouverture du marché, la levée des barrières à l’entrée, et la suppression de toute clause de nationalité entre les pays qui l’adoptent.

Projet renvoyé aux calendes grecques

Les consultations concernant le projet Open sky en Tunisie ont commencé sous l’ancien régime, dans le cadre du programme présidentiel pour le quinquennat 2009/2014 et les accords devaient être conclu le 7 novembre 2011. La révolution de la dignité a repoussé leur signature et le projet fut renvoyé encore une fois aux calendes grecques.

Même si ce projet reste très attendu par les professionnels du tourisme tunisien afin de sortir le secteur de sa morosité, il n’en demeure pas moins que l’actuel gouvernement, dont les idées économiques sont proches de l’ultra-étatisme protecteur et rétrograde, voit d’un mauvais œil la libéralisation totale du ciel tunisien.

Voulant faire preuve de protectionnisme primaire à l’égard de la compagnie nationale Tunisair, en difficulté, les autorités publiques semblent encore inconscientes du bienfait que peut apporter une libéralisation de ce secteur.

En effet, la théorie économique nous enseigne que la libéralisation d’un marché par le démantèlement d’un monopole augmente le bien-être des consommateurs à travers une diversification des services, une baisse significative des prix, due à la concurrence, et l’amélioration de la qualité des services proposés.

Le directeur général de l’aviation civile au ministère du Transport, Habib Mekki, a précisé que les négociations avec l’Union européenne (UE) ont été repoussées à une période indéterminée. La raison invoquée, entre autres assez surprenante, c’est la nécessité de se donner du temps pour faire des réformes structurelles afin de redresser la compagnie nationale Tunisair.

Ce raisonnement peut paraître assez curieux, voire économiquement incohérent dans la mesure où la restructuration d’une entreprise en situation de monopole, qui plus est déficitaire, doit passer par le démantèlement de sa position monopolistique et l’ouverture à la concurrence afin qu’elle puisse améliorer sa compétitivité.

L’exemple édifiant de la Royal Air Maroc

L’attitude du ministère du Transport, explique donc la colère des professionnels du tourisme qui se sentent totalement délaissées au profit de Tunisair. Par ailleurs, l’expérience marocaine, qui a très rapidement compris les avantages de l’ouverture de son ciel aux compagnies low-cost, a permis à la compagnie Royal Air Maroc, l’équivalent de Tunisair, de se tonifier et de redynamiser son transport aérien national et ainsi ne pas le laisser en marge de l’ouverture du monde au marchés internationaux.

Le dirigeant d’Atlas Blue, Zouhair El Aoufir, filiale à 100% de la Royal Air Maroc, a ainsi déclaré avec une certaine fierté que les «low cost, low fare et high quality sont les fondamentaux du mode économique de sa compagnie».

Défendre donc l’Open sky c’est, d’une part, fournir une des solutions pour permettre au secteur du tourisme de se sortir de sa crise, et, d’autre part, de créer une bulle d’air pour les usagers du transport aérien tunisien, depuis trop longtemps abusés par la politique de tarification assez excessive de la part de la compagnie publique.