Le gouvernement table sur une croissance de 3,5 en 2012, grâce à la reprise du tourisme, de l’agriculture et des industries exportatrices, et sur la création de près de 100.000 emplois. Prévisions ambitieuses, sinon irréalistes.


Le ministre chargé des Dossiers économiques et sociaux, Ridha Saidi, a annoncé, dans un entretien à l’agence Tap, que «le gouvernement présentera, fin mars 2012, dans le cadre de l’examen de la loi de finances complémentaire, un programme économique et social cohérent», à l’Assemblée nationale constituante (Anc).

«A travers ce programme, élaboré en concertation avec toutes les parties sociales (Ugtt, Utica) et des experts, le gouvernement cherche à garantir un développement régional équilibré, à impulser l’emploi, à améliorer la croissance et à renforcer l’investissement», a expliqué le ministre.

L’annonce de ce programme intervient à un moment où le gouvernement fait l’objet de critiques pour son retard à présenter un programme économique permettant de sortir le pays de l’état de récession économique et aider les investisseurs à avoir plus de visibilité en ce qui concerne la stabilité du pays et l’amélioration du climat des affaires.

Un taux de croissance de 3,5% en 2012

Le gouvernement s’attend, à travers ce programme, à un taux de croissance du Pib de 3,5% en 2012 contre un taux négatif de -1,8% en 2011. Il calcule cette performance sur la base d’une éventuelle relance du tourisme, d’un rendement agricole positif et d’un rétablissement de l’activité du secteur des phosphates.

Sur le plan touristique, tout demeure tributaire de la récupération des marchés émetteurs. Le ministre a relevé, à ce sujet, que «la partie allemande a promis, récemment, un coup de pousse au tourisme tunisien, en marge de la visite effectuée, en mars 2012, par le chef du gouvernement en Allemagne».

Il a précisé que les opérateurs touristiques allemands ont exprimé leur volonté d’œuvrer à doubler le nombre des touristes allemands visitant la Tunisie, par rapport à 2011, en le portant à 500.000 cette année et à 1 million au cours des prochaines années, son niveau de 2000-2001.

Le gouvernement actuel mise aussi sur un retour à la normale des flux touristiques de provenance d’Algérie, suite à la campagne de promotion lancée sur ce marché et soutenue par le gouvernement algérien.

Ces facteurs, a souligné le ministre, sont de nature à aider le secteur à réaliser un taux de croissance de 3% en 2012.

Une «saison agricole exceptionnelle»

En ce qui concerne l’agriculture, M. Saidi a indiqué que «le gouvernement est optimiste» et s’attend à une «saison agricole exceptionnelle», et ce, en raison des facteurs climatiques favorables (pluviométries, réserves en eaux...), qui pourraient contribuer à la réalisation d’un taux de croissance du secteur de 2,9%.

En ce qui concerne le secteur industriel, «une relance est prévue cette année, et ce, en raison de la reprise de l’activité du secteur des phosphates (61%), la croissance des secteurs du pétrole (5%), de l’électricité (3%) et des industries manufacturières (2,5%)».

Ces objectifs ont été fixés sur la base d’une augmentation de 4,1% de la consommation privée, de la croissance des exportations tunisiennes de 5,8%, des importations de 5,3% et de l’évolution de l’investissement de 12,8% (le taux d’investissement global pourra atteindre, en ce cas, 22,7% du Pib).

Le gouvernement aspire également à limiter le déficit courant à un taux de 6,5% et à maîtriser le taux d’inflation à la limite de 3,8%, l’objectif étant de préserver les équilibres généraux du pays.

Création de 95.000 emplois dans le secteur public

Ridha Saidi a indiqué que «l’emploi est perçu, par le gouvernement actuel, comme étant une priorité absolue», relevant que «le taux de croissance prévu permettra de créer pas moins de 70.000 emplois» (contre un nombre de chômeurs estimé à 800.000, environ 18,3% de la population active !). En fait, ce chiffre, déjà très optimiste, ne permettra pas de couvrir les demandes additionnelles d’emploi pour 2012, évaluées à 90.000 emplois.

Le ministre chargé des Dossiers économiques et sociaux a déclaré que le gouvernement œuvrera pour «la création de 25.000 emplois dans le secteur public hors commerce (encadrement social et psychologique dans les établissements scolaires, renforcement des équipes sanitaires dans les hôpitaux régionaux, renforcement des capacités régionales en matière d’accompagnement des projets prévus pour la période 2012-2013)».

Ridha Saidi a annoncé, par ailleurs, que le gouvernement entamera, cette année, la réalisation de plusieurs projets d’infrastructures, dont celui de la protection de la ville de Bousalem (Jendouba) contre les inondations à travers le transfert du parcours de Oued Medjerda.

Il a indiqué que le gouvernement envisage de lancer une étude de faisabilité concernant le projet de transfert des eaux du nord vers le centre et le sud, et ce, en partenariat avec des bailleurs de fonds tels que la Banque islamique de développement (Bid), la Banque africaine de développement (Bad), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Bird) et la Banque européenne d’Investissement (Bei).

Ce projet devrait aider à faire face, d’une part, à la pénurie des ressources en eaux dans ces régions, et d’autre part, à alléger la pression sur les barrages qui ont atteint, en 2012, leur capacité extrême de rétention (remplissage), ont débordé et provoqué de graves inondations dans les régions du nord-ouest.

D’autres projets d’infrastructure routière seront mis en œuvre cette année, dont celui de l’aménagement de l’autoroute Enfidha-Kairouan-Gafsa (350 km) et le parachèvement de l’autoroute Sfax-Gabès-Oued Zarga-Bousalem.

Des zones logistiques seront également aménagées aux ports de Rades et dans les zones de Jebel-Oust et Zarzis.

En ce qui concerne l’octroi de la concession de la raffinerie de Skhira, M. Saidi a souligné que «deux entreprises, Qatar Petroleum (Qatar) et Petrofaq (Grande Bretagne), ont exprimé leur intérêt pour la réalisation de ce projet intégré d’industries pétrochimiques. Des négociations seront engagées avec l’Algérie et la Libye pour le financement du projet», a-t-il ajouté.

En ce qui concerne les régions intérieures, longtemps délaissées par les plans de développement, M. Saidi a précisé que «le gouvernement s’emploiera a y développer une infrastructure de base (routes, services publics, zones industrielles, etc.) de manière à y attirer les investisseurs».

Il a évoqué, dans ce contexte, le démarrage de l’exploitation des mines de Oum El Khachab à Metlaoui (Gafsa) et de Sra-Ouertane (Kef) et celui des projets d’engrais chimiques à Mdhilla 2 (Gafsa) et de phosphogypse (Gabès).

M. Saidi a aussi évoqué, dans le domaine des télécommunications, l’octroi, en 2012, d’une troisième concession pour les services téléphoniques de troisième génération (3G) et la mise en œuvre, par des investisseurs étrangers , de «méga projets» de tourisme dans les régions.

Une politique budgétaire expansionniste

Sur le plan financier, le ministre a indiqué que le gouvernement a adopté «une politique budgétaire expansionniste et accepté un taux de déficit budgétaire situé à 6,5% et un taux d’endettement de 47%, et ce, sur la base de projections de moyen terme visant à maîtriser le déficit à la limite de 3% et à ramener le taux de la dette à moins de 40% à l’horizon 2017.

Sur un autre plan, il a souligné que l’Etat est déterminé à hâter la cession des propriétés confisquées (sociétés, voitures, biens immobiliers.) dont la valeur est estimée à plus de 20% du Pib. Cette opération de cession permettra de générer des recettes de près de 200 millions de dinars.

Source : Tap.