L’avenir de la pêche du thon rouge s’est joué, hier, à la conférence de la Convention sur le commerce international des espèces sauvages menacées (CITES) à Doha (Qatar). La conférence s’est finalement prononcée pour le rejet de la proposition de Monaco visant à suspendre le commerce international de ce grand prédateur. La Tunisie, qui s’y opposait fermement, est soulagée.

 

Les représentants de quelque 150 Etats parties à la Convention ont examiné hier  la proposition monégasque de porter le thon rouge d’Atlantique-Est et de Méditerranée à l’Annexe I de la CITES, où il rejoindrait les tigres et les rhinocéros. «Ce que nous demandons c’est de laisser cette espèce tranquille cinq ou dix ans pour se donner une chance d’éviter la catastrophe annoncée», a expliqué l’ambassadeur du Monaco à la conférence, Patrick Van Klaveren.
Parmi les pays qui s’opposaient à cette proposition, il y a, bien sûr, le Japon, qui consomme 80% du thon rouge, ainsi que les pays méditerranéens comme la Tunisie, le Maroc, la Turquie ou encore Malte, qui craignent que l’arrêt du commerce n’affecte leurs pêcheurs, sans possibilité de compensation ou de dédommagement.
Selon notre délégué à Doha, Khaled Zahlah, cité par l’AFP, la Tunisie est hostile à la suspension du commerce international du thon rouge, parce que cette question «n’est pas l’affaire de la CITES mais celle de l’ICCAT», la Commission internationale pour la Conservation des Thonidés de l’Atlantique. «La Tunisie s’opposera à toute inscription du thon à l’Annexe I ou à l’Annexe II» de la Convention, car cela signifiera, pour la première, une interdiction du commerce international, et pour la seconde, un commerce étroitement contrôlé. «C’est pour nous d’abord et avant tout une problématique économique et sociale. Notre position est difficilement négociable», a prévenu Khaled Zahlah. La Tunisie, qui dispose d’un quota de 1 060 tonnes de thon rouge pour l’année 2010, est déterminée à réaliser la totalité de ce quota.  
La plupart des 22 membres de Ligue arabe estiment, eux aussi, que l’interdiction de l’exportation du thon rouge pourrait heurter les pays halieutiques pauvres et qu’elle n’est fondée sur aucun avis scientifique. «La plupart des pays méditerranéens ont peur parce qu’ils exportent ce thon», a ainsi déclaré Ahmed Said Shukaili, un délégué du Sultanat d’Oman, dont le pays entend suivre la position de la Ligue arabe. «Il y a beaucoup d’inquiétudes pour les pêcheurs qui vivent de ce poisson», a-t-il ajouté, parlant lui aussi d’une «question économique».
Finalement, la proposition monégasque a été rejetée par 68 voix, contre 20 favorables et 30 abstentions. La proposition européenne, qui prévoyait un délai d'inscription à l’Annexe I, a également été rejetée par 72 voix contre 43 et 24 abstentions.

H. K.