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Décidément c’est écrit : le peuple tunisien continuera de souffrir et son calvaire se poursuivra car son supplice ne s’est pas achevé le 14 janvier 2011 comme le croyaient certains naïfs. Il a juste... recommencé...

Par Boussaadia Habib*

 

Certes, à cette date il a chassé un horrible dictateur, mais malheureusement pour se faire arnaquer par une horde de malfaiteurs! Ils étaient nombreux à rentrer après le départ précipité de Ben Ali: ils y avaient les islamistes avec leur armada de faux pieux, d’infidèles prêcheurs et surtout d’authentiques terroristes, les vrais vétérans d’Afghanistan. Ils y avaient aussi les pseudos intellectuels de gauche, les humanistes approximatifs et les théoriciens de la discorde.

Promesses mirobolantes, incompétence et laxisme

Tous sont rentrés à la hâte, tous ont célébré la révolution, encensé le peuple et la jeunesse de belles paroles, fait des promesses mirobolantes et nous ont subjugués par leur patriotisme! Emportés par leur élan de changement, les Tunisiens ont voté le 23 octobre 2011 pour cette nouvelle génération de politiciens qui bouillonnaient d’envie de s’emparer du pouvoir!

Hélas pour le peuple tunisien, le résultat fut inverse à l’attente et aux espoirs placés en eux. Les pseudos opposants ont déçu une fois qu’ils ont été appelés à mettre en pratique leur ambitieux programme.

Le cynisme, l’égoïsme, la rancœur et la rancune ont explosé au grand jour en dépit des efforts grotesques de ces politiciens de salon de montrer le contraire.

On a l’impression que le pays est géré à distance par des forces hostiles dont le souci premier est de s’assurer une transformation radicale de la société et non de promouvoir une reprise économique grâce aux investissements ciblés et une meilleure répartition des maigres acquis du pays.

L’opposition ou ce qu’elle croit être, n’est pas sans reproche car elle a dévié de son rôle pour chercher coûte que coûte la confrontation avec la troïka, faisant le bonheur de cette dernière qui s’est d’ores et déjà, positionnée en victime d’une opposition qui l’empêcherait de réaliser son plan, occultant ainsi les bévues et les balourdises dont elle est à 100% responsable! Concrètement qu’avons-nous gagné avec ces gens là?

* La saleté et les ordures s’étalent au grand jour dans les villes et les zones rurales alors que la hausse vertigineuse des prix des denrées alimentaires basiques pour le citoyen donnent une idée sur la souffrance quotidienne du citoyen devant l’absence de l’Etat de droit!

* Parallèlement le nombre effarant de pseudos conseillers de la présidence et du gouvernement donne le tournis quand on sait les difficultés budgétaires de l’Etat: avec cet argent, on aurait pu assurer un investissement rentable de l’Etat dans les zones défavorisées!

* La multiplication des agressions physiques contre les mécréants laïcs, la banalisation des meurtres politiques et l’éclosion du terrorisme ont traumatisé notre société habituée à vivre en paix malgré sa diversité culturelle!

* Le plus choquant dans tout ça est la duplicité de langage, les mensonges éhontés et les fausses promesses trahissant une culture de l’hypocrisie qu’on croyait improbable avec des gens qui nous parlent de «charia»: on va négocier, puis on va en parler, puis on est près d’un accord, puis on va juste discuter au conseil de la choura et on va délibérer tard dans la nuit (mon dieu quelle conscience!); et puis un élu bien intentionné nous sort un petit numéro de cirque connu genre «habous» ou autre connerie (manœuvre dilatoire) qui va replonger le pays dans la tristesse!

* Le plus choquant des plus choquants des mascarades de la troïka a été ce feuilleton de nomination du Premier ministre: un consensus de tous les partis est obligatoire! Les Arabes sont connus depuis la nuit des temps qu’ils sont toujours d’accord pour ne pas être d’accord et cette maxime est encore plus vraie lorsque vous essayez d’obtenir l’adhésion d’une mixture de politiciens bas de gamme, de courants différents et qui se sont érigés en décideurs de l’avenir des Tunisiens.

Un patriotisme décadent

On vous laisse imaginer le carnaval qui dure depuis 6 semaines avec des candidats au poste de Premier ministre qui font le tour des partis pour obtenir le sésame et l’onction suprême et le Quartette qui retarde à chaque fois l’échéance parce que 2 ou 3 partis n’ont pas approuvé!

Quand vous avez un Congrès pour la république (CPR), centre de pervers reconvertis, un front de salut sans salut, des «Nahdhaouis» nébuleux, une gauche très gauche, et bien, soyez assurés que le blocage est patent et évident!

En conclusion, messieurs les politiciens bravo pour votre patriotisme décadent, votre égoïsme révoltant et surtout votre inconscience ! Le schisme nous guette, le terrorisme nous harcèle, le déclin économique envenime notre quotidien et vous, pendant ces moments tragiques, discutez d’un Premier ministre idéal, selon votre vision étroite occultant dès lors l’intérêt supérieur de l’Etat!

Les Américains ont réussi un grand coup avec le printemps arabe qu’ils ont enfanté: ils ont réussi à nous montrer le vrai visage des islamistes lorsqu’il s’agit de gouverner, puis ils ont anticipé un retour de ces extrémistes dans leurs pays respectifs où ils peuvent s’adonner à leur idéal terroriste, et enfin en œuvrant pour la «oumma» ils occultent le problème palestinien du fait de la disparition des frontières.

Franchement on a encore du chemin à faire pour construire une société moderne, mais de la manière où on a procédé le chemin sera plus long et chaotique!

* Médecin de pratique libre.

 

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