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Comme le dit le dicton «1 an ça va, 2 ans bonjour les dégâts», c'est le moins que l'on puisse dire après 2 éprouvantes années de gouvernance de la troïka, la coalition au pouvoir dominée par le parti islamiste Ennahdha.

Par Habib Boussaadia

Le peuple Tunisien est à bout à cause d'une inflation non maitrisée, une économie anémiée, une sécurité non assurée et enfin un terrorisme récemment installé! La déprime le touche, la tension artérielle grimpe, le diabète se déséquilibre et, pour ne rien arranger, le porte-monnaie se vide!

Ettakatol et le CpR regardent ailleurs

Malgré cette situation socioéconomique lamentable, et alors que les agences de notation ont encore une fois abaissé la note souveraine de la Tunisie pour manque de visibilité politique, nos chers gouvernants s'accrochent stoïquement à leur légitimité dépassée depuis un an déjà.

Je ne cesse de m'interroger, comment est-on arrivé à ce stade de dégringolade? Est-ce parce que les petits poucets partenaires d'Ennahdha, à savoir le Congrès pour la république (Cpr) et Ettakatol, ont été hypnotisés par le pouvoir et ont oublié de démissionner et quitter l'attelage Ennahdha? Comment a t-on basculé dans la terreur et dans l'horreur? Est-ce parce que notre président provisoire, qui se targue d'être un humaniste, regardait ailleurs pendant qu'Ennahdha tailladait la Tunisie, son peuple, son histoire, son héritage et son économie?

Pour rappel, je dirai que tout a commencé, en fait, après les élections d'octobre 2011. Ennahdha, chargé de former un gouvernement, met en route son programme machiavélique gardé secret pendant plus de 30 ans: à côté d'un discours mielleux d'unité nationale, de promesses mirobolantes de lutte contre le chômage endémique, on procède à l'envahissement et au quadrillage de l'appareil administratif de la république en se focalisant sur les ministères de souveraineté. Le scénario de la conquête de l'Etat qui dure depuis 2 ans se déroule en 3 actes.

1- On négocie d'abord une alliance avec Ettakattol et le CpR : cela prend 3 mois et le peuple se dit que c'est normal puisqu'il s'agit de concilier 3 groupes à vocation politique différente; mais comme le gouvernement regorge de ministres, conseillers, super-conseillers, attachés et détachés, le peuple s'est rendu compte qu'on a essayé de satisfaire l'appétence et la rapacité des cadres de ces partis. Cette association s'avère synergique tactiquement puisque malgré toutes les dérives politiques avérées d'Ennahdha, le CpR et Ettakattol, appliquent à la lettre la politique de l'autruche, ne songeant même pas à quitter l'attelage lors d'événements qui auraient exigé et justifié la démission des gouvernements Troïka I et II : agression des manifestants à Tunis le 9 avril 2012 avec une milice nahdhaouie, ou à Siliana avec des balles de plomb dispersible, crimes politiques contre des leaders de l'opposition et enfin attentats terroristes... qui sont autant d'occasions où on aurait aimé voir un sursaut d'orgueil ou de patriotisme de la part de ces petits poucets! Non, c'est juré, ils ne démissionneront pas pour ne pas perturber la pérennité de l'Etat!

Justice et sécurité phagocytées par Ennahdha

2- Ensuite, en cédant la présidence de la république au CpR et celle de l'Assemblée nationale constituante (ANC) à Ettakattol, Ennahdha se focalise sur les ministères régaliens de la Justice et de l'Intérieur qui deviennent les outils d'assujettissement des Tunisiens. Je passe sur les impairs de certains ministres comme celui qui signe un décret lui octroyant 20 ans de salaires, ou des propos odieux de cette ministre des Affaires de la femme ou de ce super ministre de la balourdise qui demandait aux universitaires de faire la cueillette des olives, et je me concentrerai sur ces 2 ministères. Ainsi, côté justice cette fois, en fonction de la sentence attendue et calculée, le procureur nomme les juges qu'il faut dans les procès qu'il faut gagner. Ces derniers vont inculper un journaliste rebelle, ou prononcer un non-lieu pour les protégés barbus. C'est au nom de l'indépendance de la justice que les mandats d'arrêt contre le très médiatique journaliste Zied El-Heni ou de l'homme d'affaires Kamel Eltaïef, ennemis présumés d'Ennahdha, sont délivrés le week-end (repos administratif signifie séjour assuré en geôle). Pour nos barbus jugés pour l'attaque de l'ambassade des USA, la clémence des juges restera dans les annales de la justice comme la preuve évidente que la démocratie est bien phagocytée par Ennahdha.

Côté ministère de l'Intérieur, c'est la foire entre partisans et adversaires d'Ennahdha: les premiers protègent les criminels et les terroristes qui sont presque «choyés» par les services de renseignement, peuvent commettre leurs actes horribles et quitter le territoire tunisien en toute impunité, alors que les seconds sont froissés de voir leur ministère infiltré par des âmes perfides!

Pendant ce temps le ministre de l'Intérieur est juché sur sa chaise, perplexe et désorienté par cette guerre fratricide au sein de son département et attend que le dialogue national (s'il parvient à son terme!) lui octroie une retraite salutaire!

Sur le plan international maintenant, on a eu un ministre et un président qui se sont associés pour éclabousser et ternir l'image de la Tunisie: on peut citer le «Sheratongate», la participation au meeting annuel de l'ONU avec un discours hors-sujet ou encore l'absence de la voix de la Tunisie à des sommets mondiaux par manque de flair politique! Même le ministre des Affaires religieuses a cru bon de se substituer à son collègue des Affaires étrangères en gérant à sa manière la crise syrienne. Il a sacralisé les rebelles syriens, laissant nos chers prêcheurs islamistes exporter des jeunes combattants au nom du jihad et des adolescentes pour accouplements sacrés au nom du «jihad nikah»: remarquez au passage que ces prédicateurs ont omis d'envoyer leurs proches pour accomplir ces actes à haute valeur symbolique dans l'islam et que l'Etat non plus n' a rien fait pour les inculper pour détournement de mineures et surtout pour incitation à la débauche sexuelle!

Quand ils vont revenir au pays, bien aguerris, déshumanisés, ils auront du mal à réintégrer la société civile et rejoindront naturellement le camp des terroristes!

Le ciel nous tombe sur la tête

3- Reste enfin la dernière touche pour faire tomber le pays dans le chaos: c'est l'entrée fracassante des hordes terroristes. Après s'être entrainés en toute quiétude dans les montagnes tunisiennes, voilà qu'ils entament leur oeuvre destructrice de l'appareil sécuritaire de l'Etat.

Désormais militaires, gardes nationaux et policiers sont visés par de lâches attentats terroristes car ils incarnent le «taghout»!

L'Etat a fini par se réveiller de sa torpeur en qualifiant Ansar Charia d'organisation terroriste et a compris que ces monstres de l'horreur ne peuvent être traités avec des pincettes!

Si vous faites le bilan de 2 années de troïka, vous aurez le résultat suivant : 1- une société divisée par la volonté des pseudo prêcheurs entre les bons croyants «niquabés», les croyants moins appliqués et les croyants non pratiquants marqués du sceau de l'infidélité; 2- une société effrayée par des terroristes qui la terrifient par à coups; 3- une société qui a peur de l'avenir, ne mange plus à sa faim, ne consomme pas à sa guise, et qui se prépare au pire.

En face on a des politiciens cyniques qui abusent, dupent et leurrent leurs partenaires, leurs rivaux et le peuple tunisien dans sa totalité, en affirmant que ce gouvernement légitime est d'une remarquable efficacité !

Bon dieu qu'avons-nous fait ce 23 octobre 2011 pour que le ciel nous tombe sur la tête!