Au moment où des athlètes blacks et beurs issus de l’immigration font retentir la Marseillaise dans l’enceinte du Stade olympique de Barcelone, Nicolas Sarkozy remet sur la table la politique sécuritaire anti-immigration, terreau de son élection en 2007. Une posture aussi prévisible que révoltante…


Après avoir limogé le préfet de l’Isère et pointé du doigt «certains» Roms et gens du voyage, le chef de l’Etat français a annoncé, la semaine écoulée, sa détermination à durcir la législation en matière de nationalité et de faire adopter de nouveaux critères de déchéance de nationalité.
Le chef de l’Etat français a réclamé que les auteurs de crimes contre les personnes dépositaires de l’autorité publique puissent être déchus de la nationalité française. Pour ce genre d’infractions, il a aussi demandé l’application de peines plancher.
Dans un élan de surenchère opportuniste, son ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a proposé d’aller plus loin en étendant les possibilités de déchéance de nationalité à l’excision, à la traite d’êtres humains et à la «délinquance grave».



«Guerre nationale» contre la criminalité
Ces nouvelles dispositions seront introduites dans des projets de loi dès septembre, a annoncé M. Hortefeux. A la demande de Sarkozy, visiblement pressé de revenir dans les sondages, le secrétaire national de l’Ump en charge de la sécurité, Eric Ciotti, a déjà retroussé les manches. Il est en train de préparer un texte prévoyant deux ans de prison pour les parents de mineurs délinquants qui n’auront pas respecté les obligations de la justice.
En lançant ainsi sa «guerre nationale» contre la criminalité, faisant au passage – et très opportunément – un «amalgame entre immigration et criminalité», au moment même où des athlètes blacks et beurs issus de l’immigration faisaient retentir la Marseillaise dans l’enceinte du Stade olympique de Barcelone, à l’occasion des Championnats d’Europe d’athlétisme, M. Sarkozy prend une posture aussi prévisible que révoltante d’opportunisme politique.  
En perte de vitesse dans les sondages, mais incapable de répondre aux attentes des Français, notamment en matière de réponse à la crise et de création d’emploi, et tout aussi incapable de dissiper le malaise suscité par les affaires éclaboussant sa famille politique, notamment son ministre de l’Emploi, Eric Woerth, et son parti, l’Ump, le président français cherche à l’évidence ressouder son camp et à doubler une extrême droite qui est en train de reprendre du poil de la bête.

Le président de la peur

En mettant de nouveau sur la table les problèmes de l’immigration et de la sécurité, terrain traditionnel de l’extrême droite lepéniste, Sarkozy joue sur les peurs de l’électorat de base de la droite, en perspective de la campagne pour l’élection présidentielle de 2012, à laquelle il sera sans doute candidat.
«Dérive droitière», «dérive antirépublicaine», «attaque aux fondements de la citoyenneté»… Dans un sursaut d’honneur, la France républicaine s’indigne…  
Martine Aubry, chef de file des socialistes n’a pas manqué de qualifier ces nouvelles sorties présidentielles contre l’insécurité de «dérive antirépublicaine qui abîme la France et ses valeurs par des lois d’exception aussi iniques que vraisemblablement anticonstitutionnelles», reprenant ainsi à son compte les réserves émises par des juristes.
Selon le politologue Roland Cayrol, cité par l’Afp, l’objectif de Nicolas Sarkozy est clairement électoral. «Sa stratégie, c’est d’abord de rassembler son camp de base. Même du côté du cœur de cible, c’est-à-dire des sympathisants Ump, il commençait y avoir du flottement».
«Les signes les plus forts qu’attendent ces électeurs, c’est sur la crise et l’emploi. Mais comme là il n’y a pas de marge de manœuvre, Nicolas Sarkozy actionne le deuxième levier que sont l’insécurité et l’immigration et précisément le lien assez trouble» que ses électeurs de 2007 «font entre ces deux thèmes», explique encore M. Cayrol.
Selon un autre analyste, Stéphane Rozès, cité également par l’Afp, «l’objectif de court terme» de Sarkozy, «c’est de redevenir maître de l’agenda politico-médiatique après une longue séquence où il a perdu la main». Et ce en réaffirmant «l’idée que d’un côté il y aurait quelqu’un qui s’occupe des citoyens du quotidien et de l’autre une gauche angélique». Quant à son «objectif à long terme», il serait, selon le même analyste, d’aspirer à nouveau l’électorat de Jean-Marie Le Pen.
Reste à savoir si la France, et particulièrement l’électorat de l’Ump, vont s’honorer de ce «noble» programme !!

 

Imed B.