Une femme se fait violer en Tunisie par des policiers et c’est elle qui comparait devant la justice. C’est une honte pour un pays qui a consacré les droits de la femme depuis plus de 50 ans.

Par Marouen Achouri*

Le viol est certainement l’un des crimes les plus crapuleux, les plus révoltants et les plus durs à assumer pour ceux qui en sont victimes. Toutefois, la justice tunisienne semble ne donner aucune importance à ces considérations en convoquant la victime d’un viol en tant qu’accusée pour atteinte aux bonnes mœurs.

Un sentiment de révolte et de rage

C’est un sentiment de révolte et de rage qui s’empare de nous quand on s’aperçoit que la justice tunisienne devient complice de criminels coupables de viol. Il est clair que cette basse manœuvre vise à mettre cette pauvre victime sous pression pour l’inciter à retirer sa plainte contre les flics suspectés d’avoir perpétré ce viol.

Au-delà du caractère indécent et injuste d’une telle convocation, il est utile de s’interroger sur les conséquences d’un tel événement.

Le dégoût suscité par autant de manque de respect à la victime d’un viol ne peut qu’approfondir la crise de confiance ressentie par le citoyen tunisien vis-à-vis d’institutions supposées protéger son intégrité morale et physique. Que dire quand ces institutions sont celles qui violent cette intégrité, au propre comme au figuré?

La police tunisienne a encore un très long chemin à faire pour gagner la confiance des Tunisiens, encore faut il qu’elle en ait la volonté. Tantôt instrument de répression et de torture, tantôt une réelle menace pour la paix sociale, la police tunisienne ne réussit qu’à rompre le contrat qu’elle a avec la société.

Police et justice, deux faces d’une même pièce

Cette affaire de viol est l’apogée de l’indécence et de la bassesse morale d’une police en crise. Pourrons nous, un jour, avoir une police professionnelle, intransigeante et neutre de toute coloration politique? Sans vouloir verser dans la dramatisation, ce n’est pas en écoutant les déclarations de Khaled Tarrouche, chargé de la communication auprès du ministère de l’Intérieur, qui justifie maladroitement ce viol que l’on pourrait répondre par l’affirmative.

C’est là que tous les observateurs et acteurs de la société civile s’en sont remis à la justice pour essayer de panser les blessures de cette jeune fille violée et celles d’une société choquée et abasourdie par ce crime.

Malheureusement, la déception a été grande en découvrant que la dite
«justice» a préféré convoquer la jeune fille pour atteinte aux bonnes mœurs.

La justice tunisienne est tout bonnement complice de criminels coupables de viol. Au diable la présomption d’innocence car ces policiers sont coupables de rompre la confiance placée en eux et avec eux les magistrats responsables d’une telle convocation.

Aujourd’hui, des pères demandent à leurs filles de ne pas s’arrêter en route si elles sont accostées par des flics. On regarde tous les policiers, non plus comme des citoyens à part entière mais comme une potentielle menace. La justice tunisienne est à mettre dans le même sac car plus aucune confiance n’est possible.

Une femme se fait violer en Tunisie par des policiers et c’est elle qui comparait devant la justice. C’est une honte pour un pays qui a consacré les droits de la femme depuis plus de 50 ans, c’est une honte supplémentaire que ce genre de chose arrive dans un pays post révolutionnaire qui espère donner l’exemple.

Aujourd’hui, beaucoup de Tunisiens ont honte à cause de cette nouvelle.

* Producteur télé.