Est-ce que le droit et la morale admettent que les élus de la constituante puissent voter des lois dont ils sont les bénéficiaires directs? C’est pour le moins immoral.

Par Béchir Turki*


Dans son discours du lundi 9 avril, prononcé au parc public aménagé à la place de l’ancienne prison civile, à l’occasion de la commémoration de la journée sanglante du 9 avril 1938, Rached Ghanouchi nous fait part de sa requête à l’Assemblée nationale constituante (Anc) quant à l’accélération de la promulgation des lois concernant la réhabilitation des droits des victimes, «ceux qui ont lutté contre le despotisme des deux anciens régimes».

D’après certains médias, le ministère des Droits de l’homme et de la Justice transitionnelle aurait à gérer dans un proche avenir une nouvelle caisse de compensation dotée au départ de la somme de 750 millions de dinars. Cette caisse aurait pour vocation la distribution des indemnités aux futures ayants droits, c’est-à-dire des ex-prisonniers politiques, dont la majorité est membre du parti d’Ennahdha.

Ainsi, et en résumé, les élus nahdhaouis vont se faire voter des lois, leur permettant d’encaisser des dizaines de milliers de dinars chacun, et ce au prorata de leur séjour en prison.

Autrement dit, on légifère pour pouvoir punir légalement le peuple tunisien et le spolier, pour des fautes que l’on prétend avoir été commises par nos anciens dirigeants. On légifère en dehors de la mission impartie de la constituante. Quelles sont ces victimes qu’on nous présente aujourd’hui? Ces gens étaient-ils vraiment des innocents? N’avaient-ils pas été jugés par des tribunaux légaux et condamnés pour leurs actions subversives selon des lois? N’avaient-ils pas vitriolé des citoyens et des citoyennes? N’étaient-ils pas responsables d’actes de sabotage et de meurtre? Ne tramaient-ils pas dans l’ombre des coups d’Etats? Etaient-ils donc des anges? Mais maintenant qu’ils sont au pouvoir et qu’ils contrôlent presque toute la hiérarchie administrative, ils se permettent d’entreprendre ce que la morale réprouve, et l’instinct de vengeance les pousse à des actes irrépréhensibles, mais dont les conséquences sont des plus néfastes pour la Tunisie.

Sont-ils des patriotes? Agissent-ils pour le bien de la société dont la majeure partie vit dans la détresse? Leur égoïsme, leur despotisme, leur mépris du bien public les poussent à se remplir les poches en récompense de leur terrorisme d’antan et de leur arrogance aujourd’hui.

Et ces anciens yousséfistes! C’étaient des partisans ayant pris les armes contre l’autorité et de ce fait, et ils se sont fait déclarer hors-la-loi. Ils connaissaient la cause pour laquelle ils se sont sacrifiés. Ils ont tué des centaines de leurs concitoyens, ils ont semé la terreur et la panique et ont réussi des attentats contre certains grands militants dont Mokhtar Attia et Houcine Bouzayane.

Leur chef Salah Ben Youssef a toujours refusé le dialogue et à trois reprises sa milice a essayé d’attenter à la vie de Bourguiba.

Et l’éthique dans tout cela? Est-ce que le droit et la morale admettent que les élus de la constituante puissent voter des lois dont ils sont les bénéficiaires directs? C’est immoral. Que nos hommes de lois (avocats et juges), que les Ong et que les citoyens réagissent en leur âme et conscience pour nous éviter cette injustice, avec en prime une nouvelle chape de plomb afin d’asservir le peuple et nous plonger  dans la misère.

L’islam interdit le mensonge et le double langage, l’islam interdit le vol, l’islam interdit de faire confiance aux non-musulmans. Et nos nahdhaouis usent de grands subterfuges et d’hypocrisie, obéissent aux ordres des américano-israélo-qataris dont le premier objectif est l’échec de la démocratie, et, la convoitise aidant, ils veulent s’emparer des deniers de l’Etat.

Selon les câbles diffusés par Wikileaks, on signale déjà que les relations d’Ennahdha avec l’ambassade US se sont normalisées. Monsieur l’ambassadeur rend compte dans ses messages dans ses rapports avec Zied Daoulatli, un dirigeant de ce parti. En novembre 2011, vous avouez Monsieur le chef du Gouvernement à l’ambassadeur des Etats-Unis, et ce d’après ses messages, les attentats contre les hôtels de Sousse et Monastir en 1987, comme étant les œuvres d’Ennahdha. Ce parti promet la renaissance, mais c’est vers l’obscurantisme et la décadence qu’il veut nous précipiter.

Dans le Coran, le verset 126 de la sourate l’Abeille, il est écrit: «Si vous sanctionnez, sanctionnez de la même façon que vous avez été sanctionnées et, certes, si vous renoncez à la vengeance, cela vaudra mieux pour ceux qui savent se contenir».

Soyons tolérants, vivons en harmonie, en concordance avec ce que dit l’islam, pardonnons, et unissons nos efforts pour un bonheur commun.

*- Officier de l’armée à la retraite, auteur de ‘‘Ben Ali le ripou’’ (2011) et ‘‘Eclairage sr les recoins sombres de l’ère bourguibienne’’ (2012).