Turquie Israël

Pour raconter les complots de la Turquie d'Ergogan, serviteur des Etats-Unis et allié d'Israël, contre l'unité et la stabilité des pays arabes, il faudrait tout un livre.

Par Dr Fethi El Mekki*

Il parait, selon certaines mauvaises langues, que du côté d'Ankara, on se félicite discrètement et on rigole doucement derrière les tentures... Et bon dieu qu'est qu'on rigole... En regardant l'état de la Syrie et de l'Irak...

Il parait aussi que la Turquie a une chance inouïe d'avoir à sa tête l'exceptionnel «visionnaire» Recep Teyep Erdogan... Un grand politique qui a très vite compris la marche du monde, que l'on continue d'appeler pudiquement «libre et démocratique»...

Et il parait aussi, d'après des complotistes chevronnés, que l'accession de M. Erdogan au pouvoir, le 11 novembre 2002, n'a rien à voir avec... la destruction de l'Irak en 2003... Et la dévastation de la Syrie depuis 2011... Quant à la couronne déposée sur la tête du Roi d'Anatolie, Erdogan 1er, le 14 août 2014...

L'axe mondial de l'épouvante s'est progressivement déplacé des rives du Tigre et de l'Euphrate aux rivages de la mer Noire, plaçant de fait la Turquie dans «l'œil du cyclone», dans un silence assourdissant et sans que ça ne dérange les âmes en peine occidentales...

Et bien, dis donc... Drôle de géopolitique...

Selon certains idiots... Ça ne sera que pure coïncidence... Bien évidemment...

Drôles d'oiseaux

Le jeudi 2 avril 2015, Taieb Baccouche, ministre des Affaires Etrangères, a déclaré : «Nous n'apprécions pas qu'un pays, comme la Turquie, facilite d'une façon ou d'une autre, le déplacement de terroristes tunisiens vers la Syrie. Il s'agit d'une aide au terrorisme.»

Cette déclaration n'a pas été appréciée et a même irritée et déclenché l'ire d'Ankara, qui a sommé, sur un ton ferme, le vendredi 3 avril, l'ambassadeur de Tunisie de venir s'expliquer illico-presto... Comme un écolier...

Comment peuvent-ils avoir l'arrogance et l'indécence de rappeler à l'ordre M. Baccouche, alors qu'une logistique méticuleuse, effrayante, mafieuse et exceptionnelle de par son organisation est là... Installée en toute impunité, dans plus d'une trentaine de pays, au vu et au su du monde entier... pour rameuter la vermine, les nervis et les brigands en mal d'argent, à Istanbul et Ankara... Ensuite...

N'a-t-on pas dit selon un vieil adage : «Que ceux qui disent la vérité sont emprisonnés par ceux qui ont menti au monde entier»...

L'Etat voyou

Dans son livre ''L'Etat voyou'', l'écrivain américain William Blum nous rappelle que l'expression d'Etat voyou renvoie à l'idée d'un Etat qui ne respecte pas les lois internationales les plus essentielles, viole de manière systématique les droits les plus élémentaires de l'être humain ou organise ou soutient des attentats...

Il y a, dans les turqueries de la Turquie, de la malice, de la rouerie d'Orient, un double langage de fakir... Un savoir-faire oriental rarissime... Qui ne date pas d'hier...

La Turquie est en rivalité directe avec (et non des moindres) la Chine au Xinjiang et la Russie... Et s'emploie ardument à relayer l'influence américaine...

Les séparatistes Ouighours, Musulmans sunnites et turcophones de la province chinoise du Xinjiang ou Turkistan oriental, ont toujours disposés des bases d'entrainement militaire sur le territoire turc... Et pour boucler la boucle, le 19 septembre 2004 a été fondé à Washington, le «gouvernement en exil du Turkistan oriental», de régime parlementaire dont le Premier ministre est un certain Anwar Youssef et une constitution a été proclamée... Bref au vu de la mascarade actuelle, rien de choquant...

La Turquie a aussi une politique très active dans les ex-républiques soviétiques turcophones, devenues indépendantes et fortes d'une population turcophone conséquente de près de 59 millions d'habitants...

En agissant de la sorte, M. Erdogan retire des avantages matériels et un «prestige» incommensurable dont aucun autre pays musulman ne dispose... Alléluia...

Erdogan et Perez

Erdogan fait son cinéma: la vraie fausse querelle avec le président israélien Shimon Perez à Davos.

Le cheval de Troie

Dans l'antiquité grecque, le poète Homère rapporta dans ''L'odyssée'' qu'en 1217-18 av J.-C., le prince Paris, fils de Priam, roi de Troie, déclencha la guerre de Troie, en enlevant Hélène, l'épouse du roi de Sparte Mélénas. Ce dernier, l'honneur bafoué, lève une expédition et assiège Troie l'Anatolienne, durant dix ans. En vain...

L'histoire du «cheval de Troie» est un épisode décisif de cette guerre, au cours du quelle une dizaine de guerriers grecs réussirent à pénétrer dans la ville assiégée, en se cachant dans un énorme cheval de bois aux flancs creux, offert aux Troyens, après que l'armée grecque eut signifié avoir abandonné le siège...

Au cours de la nuit, les guerriers sortent du cheval et ouvrent les portes de la ville permettant à l'armée grecque de pénétrer, de piller et de détruire Troie. Tous les hommes et les garçons seront assassinés, les femmes et filles réduites à l'esclavage...

A la suite de cette ruse de guerre, le terme de «cheval de Troie» désignera désormais, un type de programme malveillant invasif et destructeur...

Le «Circus Politicus» qu'est en train de subir le monde arabe sous couvert de «révolutions» est un théâtre d'ombres et de pénombres, dominé par des réseaux aussi invisibles que puissants... où la Turquie joue un rôle incontournable.

C'est ce qui fait dire à certains, que paradoxe de l'histoire, après que les ascendants des Turcs aient bu jusqu'a la lie la légende du «cheval de Troie», est venu le moment, où les Turcs se sont retrouvés, «malgré eux», au sein du ventre du «cheval de Damas»...

Le rideau s'ouvre sur un cirque où les clowns n'amusent plus personne, mais où les chacals et les hyènes sont extrêmement dangereux...

Grandeur et décadence

La Turquie, ce pays à la fabuleuse histoire, qui a vu défiler sur ses terres, le roi perse Darius 1er (519 av. J.-C.) et son fils Xerxès, Alexandre le grand, roi de Macédoine et l'un des plus grands conquérants de l'histoire de l'antiquité (334 av. J.-C.), Constantin le grand, fondateur en 330 de Constantinople, métropole orientale du christianisme, Gengis Khan, le «souverain universel» et roi de Mongolie, qui a balayé les Turcs à Ankara en 1279, rameuté tous les ratés, damnés et désaxés de tous les continents, pour les faire passer en Syrie et en Irak, pour répandre l'horreur... au nom d'un islam dégoulinant d'hémoglobine et de bizarreries, inventé par qui on sait... Pour le besoin de la cause...

Le pays de Soliman le magnifique, le «sultan des sultans, le souverain des souverains, le distributeur des couronnes aux monarques des globes et l'ombre de Dieu sur terre»... le pays de Mustapha Kamel Atatürk, l'homme qui a défait les armés françaises, anglaises, arméniennes et grecques dans la bataille des Dardanelles en 1915, qui a aboli le sultanat ottoman, le 1er novembre 1922, et qui a fondé la république, le 29 octobre 1923... ce pays a rameuté la racaille et la canaille du monde entier pour les chouchouter, les entrainer au maniement des armes par des instructeurs américains dans des camps tout près de la frontière syrienne... Et les envoyer violer et assassiner... au nom des droits de l'homme, sans offusquer les pasquins des droits de l'hommisme de pacotille...

Le pays qui a été dépecé par le traité de Sèvres le 10 août 1920, à la suite de la 1ère guerre mondiale, au profit des alliés, des minorités kurde et arménienne, contribue à son tour à dépecer le monde arabe sans aucune vergogne au nom de la «démocratie»... sans déranger les bouffons de la bien-pensance...

La Mecque de l'hypocrisie

Le pays membre fondateur de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) en 1961, le pays fondateur de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) en 1966, le pays membre fondateur du Groupe des 20 en 1999 courbe l'échine devant les «Yankees» et leurs maitres, en envoyant, en Syrie et Irak, des milliers de voyous armés jusqu'aux dents... Une hypocrisie si impudente ne peut que forcer que le respect éternel...

Ce pays, dont le fellah d'Anatolie et le pêcheur d'Asie mineure se souviennent de la grandeur du kurde Saladin, qui enleva Jérusalem aux chrétiens en 1187 et de Mehmet II le conquérant, qui le 29 mai 1453, après un siège de 2 mois, à la tête d'une escadre de 300 navires et de 100.000 soldats, fit musulmane, Constantinople, byzantine depuis plus de 1000 ans et siège du patriarcat de l'église orthodoxe... ce pays, donc, réalise le «fantasme» d'Israël, «l'Etat monstre» enfanté par la perfide coalition anglo-américano-sioniste de 1947...

Ce pays, qui a terrorisé toute l'Europe durant trois siècles et où on vit les Slaves, les Magyars, les Roumains, les Bulgares et les Grecs, blessés dans leur chair, garder dans leur mémoire les pages de sang de leur asservissement sous le joug des soldats de l'empire ottoman pendant près d'un demi millénaire... ce pays marche à quatre pattes et rampe à plat ventre devant ceux qui ont balancé «Little Boy» sur Hiroshima le 6 août 1945...

Ce pays, qui a occupé la Serbie en 1389, la macédoine en 1392, la Bulgarie en 1396, la Grèce en 1456, la Bosnie en 1463, l'Albanie en 1479, l'Herzégovine en 1482, la Bessarabie, la Moldavie et la Valachie à la fin du XVe siècle, Rhodes en 1522, la Croatie en 1527, et la Hongrie en 1541... pour contribuer à «la paix au Moyen-Orient»... réalise, malgré lui, le rêve utopique d'Israël, qui est de «ramener le monde arabe à l'âge de la pierre»...

Souvenirs... souvenirs

Ankara (14-16) juin 2004 : «On appelle l'Union européenne à s'abstenir de toute utilisation de l'universalité des droits de l'homme comme prétexte pour s'ingérer dans les affaires intérieures des Etats et porter atteinte à leur souveraineté nationale»...

C'était le communiqué final de la 31e conférence islamiste des ministres des Affaires étrangères, qui a été ouverte par Ahmet Necdet Sezer, alors président de la république turque... comme farces et attrapes, on ne pouvait pas mieux faire, au vu de la fête foraine quelques années plus tard...

Le Kurdistan Turc est en état d'insurrection depuis 1943. Le terrorisme kurde fait mal à la Turquie, par le biais du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Ce conflit, qui a débuté en août 1984 et fait des dizaines de morts par semaine, est des plus douloureux.

Le Kongra-Gel constituait une véritable milice paramilitaire du PKK, de 5000 militants armés, pour 15 millions de Kurdes... Les attentats et les accrochages ont provoqué des pertes élevées dans l'armée et dans la population turque : 37.000 morts, en 15 ans.

Le fondateur et dirigeant du PKK, Abdallah Ocalan, a été arrêté le 15 février 1999, au cours d'une opération menée conjointement par les services secrets turcs, américains et israéliens (encore!!!). Il a été condamné à la prison à vie, le 29 juin 2002.

Depuis, les affrontements ont diminué d'intensité, mais le plus remarquable, dans tout cela, c'est que depuis 2001, soit une année avant «l'installation» d'Erdogan au pouvoir, le mouvement kurde s'est littéralement volatilisé... Pschitt... Plus rien... On n'entend plus parler de lui... Il n'a même pas eu droit à un requiem...
Simple hasard ou petit miracle de la Realpolitik?

Petites «tensions» entre «amis»

Le Moyen-Orient n'a pas connu de longue période de paix et de stabilité depuis près d'un siècle, soit depuis la découverte des gisements de gaz et de pétrole...

La situation s'est aggravée depuis l'enchâssement en son sein, le 14 mai 1948, d'un corps étranger, rejeté par toute la région, communément appelé Israël... La Turquie fut le premier et seul Etat musulman à l'avoir reconnu en 1949... Alléluia...

Ces deux puissances (Turquie et Israël), qui gèrent à leur guise et en très «étroite» collaboration cet Orient, ne sont pas arabes et mènent la danse, à leur manière, sans se soucier du qu'en dira-t-on... C'est le dernier de leurs soucis, et ils ont raison.

M. Erdogan, en ange de la paix, ne s'occupe plus de savoir ce que pensent les Arabes : il ne les voit plus; il vit sous d'autres cieux. Il n'évolue plus dans le même monde que nous. Probablement dans un monde meilleur. C'est l'autisme politique.

Le partenariat stratégique entre ces deux pays, engagés dans des programmes de coopération: militaire, renseignements, économique, technologique et culturel n'a jamais été menacé, les liens politiques et diplomatiques étant inébranlables...

En février 1996, la conclusion d'un accord cadre de coopération militaire dispose que «les pilotes de l'armée de l'air israélienne pourront s'entrainer dans le ciel turc» et «prévoit l'accès mutuel des navires de guerre aux ports des deux pays avec des manœuvres conjointes en mer Méditerranée». Alléluia...

Depuis août 2002, la Turquie fournit 50 millions de m3/an d'eau douce à Israël. Ensemble, ils sont sur un énorme projet commun de pipeline qui fournira du gaz et du pétrole à l'Inde à partir de la mer Caspienne et dont le tracé traverse Israël pour aboutir au port d'Eilat en mer Rouge...

Un tel tableau d'une aussi importante coopération devrait nous amener à nous poser des questions hautement intelligentes sur la véracité des brouilles et des déclarations récurrentes contre Israël faites par les dirigeants turcs.

Le 28 janvier 2009, M. Erdogan, dans un élan d'indignation dont il a le secret, a quitté précipitamment la tribune du Forum économique de Davos, après un échange animé avec le président Shimon Pères, qui venait, dans un long discours, de légitimer l'opération Plomb Durci contre Gaza, en janvier 2009...

Le 31 mai 2010, l'attaque israélienne du Mavi Marmara, le vaisseau mère de la flottille de la liberté pour Gaza, qui a laissé sur le carreau 9 citoyens turcs, a attisé les tensions entre les deux pays... Il s'en est suivi invectives, crachats et menaces... Et rien de plus...

Fausse colère? Fausses crises?

C'est ce qui fait dire certains pragmatiques à M. Erdogan: en arrêtant de fournir l'eau à Israël, nous commencerons à croire vos discours...

Erdogan et Perez trinquent

Erdogan, Gül et Perez lèvent le toast de l'amitié israélo-turque.

En compagnie des méduses

Robert Upshur Woodward alias Bob Woodward est un journaliste américain. En 1972, il est reporter au ''Washington Post''. Il est devenu célèbre pour avoir enquêté, avec son collègue Carl Bernstein, sur le scandale du Watergate, qui a entrainé la démission du président américain Richard Nixon en 1974. Il a écrit plusieurs best-sellers dont ''CIA: Guerres secrètes 1981-1987'' et ''Mensonges d'Etats : comment Bush a perdu la guerre''.

Paris. 7 avril 2011. La Sorbonne. Faculté de sciences politiques. Bob Woodward donne une conférence devant un parterre d'étudiants où il vient faire la promotion de son dernier livre ''Les Guerres d'Obama'', il en profite pour faire quelques confessions...

Il raconte qu'un jour, il a demandé à l'ancien Président Américain Al Gore: «Quelle part de ce qui se passe au gouvernement est connue?» Réponse d'Al Gore: «1%». «Vraiment, seulement 1%?, s'exclama Woodward. Et si vous racontiez tout ce qui est possible dans un livre, quel pourcentage des secrets du gouvernement y trouverait-on?» L'ancien vice-président ajusta : «2%». Sans commentaire...

Vilénies en Anatolie

Il y a dans les turqueries de la Turquie, république souterraine, des cachotteries d'Etat, des chefs d'œuvre de l'orfèvrerie dissimulatrice et des pièces ouvragées à double tiroir...

Dès qu'on analyse ces manœuvres, elles se révèlent ce qu'elles sont: une turquerie d'Etat qui consiste à faire croire que les couteaux plantés dans le dos des Arabes sont un acte de sagesse politique dicté par les intérêts supérieurs de la «paix mondiale»...

Que les muftis d'Anatolie déroulent les tapis du Bosphore sous les pas du grand «ami» américain et ses maitres sionistes, ne choque plus personne.

La couleuvre pour les peuples syriens et irakiens est bien grosse. Ils n'en finissent pas de l'avaler. Ça dure, déjà, depuis quelques années et dans le plat, il y en a encore, à priori, à profusion pour les années à venir.

On ne sera pas surpris si l'Etat hébreu honore, pour services rendus à Israël, le premier des Turcs, qui a convaincu les Turcs de la nécessité d'ouvrir la porte de la sublime porte aux rebuts des sociétés arabes et aux mercenaires du monde immonde occidental... Ce sera le moment solennel et spectaculaire du «Turban d'Honneur» pour celui qui a beaucoup lu Niccolo Machiavel...

Cette pièce de théâtre est une redite magnifique. De grâce, faites tomber les tentures...

M. Erdogan ne manquait pas d'humour, quand il a déclaré, la main sur le cœur, en 2003: «La Turquie fait d'énormes efforts pour aller vers l'Europe»... Si Maurice Talleyrand était encore parmi nous, de lui, il aurait dit : «Il a servi tous les maitres et presque toutes les causes».

* Pneumo-allergologue.

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