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Habib Essid et Beji Caid Essebsi Banniere

La réorganisation des pouvoirs en Tunisie exige une nouvelle vision du fonctionnement du gouvernement et des ministères

Par Wided Ben Driss*

Depuis son indépendance la Tunisie a vécu sous un régime présidentiel autoritaire qui a viré à la dictature. Notre nouvelle constitution a adopté un régime mixte avec un parlement, un gouvernement et un président de la république avec des prérogatives limitées.

A présent, le processus électoral est heureusement accompli et la Tunisie a une Assemblée des représentants du peuple (ARP) et un président pour un mandat de 5 ans. Il reste cependant encore à former un gouvernement qui mettra le pays sur les rails de la légalité constitutionnelle et oeuvrera pour le sortir de la crise sécuritaire, économique et sociale actuelle.

D'après la constitution, le chef du gouvernement sera doté de grands pouvoirs et le pays sera gouverné à partir de la Kasbah. On peut cependant s'interroger sur l'impact du changement de l'organisation des pouvoirs en Tunisie sur le fonctionnement des ministères. En se référant au gouvernement sortant, il est à rappeler qu'il y a eu plusieurs fusions de ministères pour des raisons de maitrise des coûts et de gouvernance d'une période transitoire. Nous estimons que la vision et la philosophie du prochain gouvernement sera différente.

A titre d'exemple, on citera le ministère des Droits de l'homme et de la Justice transitionnelle, annexé entretemps au ministère de la Justice, mais, après l'instauration des instances constitutionnelles (Instance Vérité et Dignité, Comité supérieur des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'Instance nationale de la prévention de la torture...), dont les missions sont renforcées par l'action des multiples associations civiles, ce ministère n'a plus de raison d'exister.

Le ministère des Affaires de la Femme, de l'Enfance et des Personnes âgées a été transformé en secrétariat d'Etat et inexplicablement rattaché au ministère de la Jeunesse et des Sports ce qui est franchement considéré comme une sorte de marginalisation. Il est recommandé de créer un ministère de la Famille qui s'occupera de la femme, de l'homme, de l'enfance et des personnes âgées dans le cadre familial. A voir les problèmes actuels de la société tunisienne (échec scolaire, divorce, maltraitance, violence, suicide...), ce ministère aura pour tâche de comprendre et de traiter les nouveaux maux de la société tunisienne.

Il est fortement recommandé de faire de la bonne gouvernance une culture et une pratique dans chaque institution publique au lieu de créer un secrétariat d'Etat ou un ministère qui lui serait dédié qui aurait des difficultés à accéder aux informations. Il faut généraliser la pratique l'audit interne, intègre et indépendant, dans chaque organisme dont les rapports seront collectés et exploités par le Premier ministère.

Il est également à suggérer de redonner son autonomie au ministère des Technologies de l'Information et des Communications, car ce secteur connait un essor important à l'échelle mondiale. La Tunisie a intérêt à miser sur ces domaines pour absorber les diplômés universitaires, tout en renforçant la coopération avec la recherche scientifique.
Il sera aussi plus judicieux de rattacher l'artisanat, qui dépend actuellement du ministère du Commerce, au département du Tourisme.

On suggérera également de créer des ministères séparés de l'Industrie, d'un côté, et de l'Energie et des Mines de l'autre, comme cela était le cas auparavant. Le cas échéant pourrait-on recommandé, dans une phase transitoire, de créer des secrétariats d'Etat de l'Energie et des Mines afin de garantir l'essor de ces deux secteurs en crise depuis des années. Car il est inadmissible de marginaliser le secteur de l'énergie sous prétexte que la Tunisie a de faibles ressources d'hydrocarbures en comparaison avec nos voisins l'Algérie et la Libye. Un ministère de l'Energie et des Mines en Tunisie encouragera la recherche dans les tous les domaines de l'énergie fossiles et renouvelables, en renforçant la coopération avec les pôles technologiques et en activant la collaboration avec les universités ce qui donnera des diplômés hautement qualifiés et de l'expertise à exploiter et à vendre.

Les Tunisiens attendent beaucoup du nouveau gouvernement qui, espérons-le, adoptera de nouvelles approches afin d'atteindre de meilleurs résultats.

* Exploration manager.

Illustration: Le président de la république Béji Caïd Essebsi et le Premier ministre désigné Habib Essid.

 

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