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En élisant M. Caïd Essebsi, la Tunisie a voté contre le sectarisme, le populisme et la division et en faveur de la stabilité et de la compétence et la sagesse.

Par Mohamed Salah Kasmi*

Hier soir, des dizaines de milliers de militants et sympathisants de Nidaa Tounès et d'autres partis et associations progressistes se sont rassemblés à l'avenue Habib Bourguiba, aux Berges du Lac, devant le siège de Nidaa Tounès et sur les places des villes et villages, pour fêter la victoire de Béji Caïd Essebsi, devenu le premier président de la République à être élu démocratiquement après la révolution du 14 janvier 2011.

La victoire d'un homme décidé et consensuel

Vainqueur du second tour du scrutin présidentiel, M. Caïd Essebsi, ancien compagnon de lutte et ministre de Habib Bourguiba confirme son ascension continue dans le paysage politique tunisien.

Le duel attendu a bien eu lieu. Le vainqueur n'a pas été élu à l'arraché mais par une majorité confortable selon un sondage sorti des urnes issu de Sigma Conseil. Il a obtenu 55,50% des voix. Son adversaire Moncef Marzouki a subi un sérieux revers en comptabilisant 44,50% des voix.

Dans un article intitulé ''Béji Caïd Essebsi sur la voie royale'' paru dans Kapitalis le 24 novembre 2014, j'écrivais que «l'élection d'un président de la République est inscrite dans les résultats du premier tour qui permettent d'anticiper ce qui pourrait se produire au second tour». Le 21 décembre 2014, l'élection de M. Caïd Essebsi confirme la justesse cette analyse.

La victoire de M. Caïd Essebsi illustre la formidable efficacité de Nidaa Tounès, la performance de sa machine électorale et le soutien des partis et associations démocrates et progressistes à son élection. Elle révèle également l'affaiblissement du camp islamiste conduit par Ennahdha qui a soutenu sans le dire M. Marzouki. Ce dernier a bénéficié également du soutien des milices des Ligues de protection de la révolution (LPR) dissoutes mais toujours actives ainsi que des éléments extrémistes de la nébuleuse salafiste.

Cette victoire change la donne politique dans le sens d'un réel rééquilibrage vital à la consolidation de la démocratie naissante en Tunisie.

Le pays a voté contre le sectarisme, le populisme, la division et la médiocrité et en faveur de la stabilité, la compétence, la sagesse et la crédibilité.

Cette victoire est considérable pour la démocratie et un nouvel espoir pour un peuple épris de liberté et de justice. C'est aussi un signe de maturité politique et d'engagement résolu sur le chemin de la transition démocratique, de la stabilité et de la réconciliation nationale.

Dès le lendemain de son installation au Palais de Carthage, le nouveau président de la République nommera un Premier ministre qui sera chargé de former son gouvernement dans un délai d'un mois renouvelable une seule fois conformément à l'article 89 de la Constitution.

La formation d'un gouvernement de coalition est rendue nécessaire en raison de la scène politique fractionnée. A l'issue des élections législatives, aucun parti n'est en mesure de former seul une majorité. Les partis du camp progressiste doivent s'entendre sur un programme commun de réformes à réaliser. C'est un véritable test de la solidité de la transition démocratique et sur la cohésion du camp des démocrates.

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Les sympathisants de Nidaa Tounes fêtent la victoire de Caïd Essebsi.

Le respect de la devise de la République

Pour réussir le changement tant attendu par les Tunisiens, il faut rester fidèle au choix judicieux des quatre vertus gravées sur les armoiries de la République : Liberté, Dignité, Justice et Ordre. Quatre principes moraux qui décrivent à eux seuls un projet de société, un avenir commun. L'un équilibre l'autre. Liberté sans dignité, sans justice et sans ordre ce serait chacun pour soi et la loi du plus fort. La liberté demeure le fondement de la démocratie. Elle comporte en elle tous les droits humains individuels et collectifs. Nous devons la protéger et la défendre. Liberté sans ordre c'est l'anarchie. Liberté sans justice c'est une société inéquitable. Liberté sans dignité n'a pas de sens car il lui manquera la mobilisation collective auprès des plus fragiles et le sentiment d'appartenance partagé. La dignité traduit la force du lien social à préserver dans une Tunisie ébranlée. Il faut que chacun se sente solidaire de toutes les personnes en difficulté, de tous les chômeurs, de toutes les femmes menacées dans leurs droits, de tous les enfants en détresse.

La clé de la réussite de notre pays est dans la cohésion nationale, la constance dans l'action, la mise en œuvre de réformes durables et la mobilisation de tous les Tunisiens pour ériger un véritable Etat de droit et garantir la sécurité, la justice, la prospérité économique, le progrès social et le bien-vivre ensemble.

* Ecrivain, administrateur général à la retraite, ancien professeur de droit social et de GRH, auteur de ''Tunisie : l'islam local face à l'islam importé'' (L'Harmattan, Paris, octobre 2014).

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