Caid-Essebsi-El-Menzah-Banniere

La victoire au second tour de la présidentielle est, peut-être, déjà inscrite dans les résultats préliminaires du premier tour donnant une large victoire à Béji Caïd Essebsi.

Par Mohamed Salah Kasmi*

Face aux 27 concurrents dont 5 se sont retirés pendant la campagne électorale présidentielle, le candidat de Nida Tounès, Béji Caïd Essebsi (BCE) obtient 42,7% des suffrages exprimés selon une totalisation des résultats à la sortie des urnes, établie par Sigma Conseil.

Des résultats sans surprise

A l'annonce de l'arrivée de BCE largement en tête au premier tour de la présidentielle du 23 novembre, les partisans et sympathisants de Nida Tounès et des autres partis ayant soutenu BCE expriment leur joie et leur bonheur devant le bon score de leur leader.

Les résultats de ce premier tour permettent de dresser la radiographie des électorats du second tour, de prévoir les reports de voix entre premier et second tour et de comprendre les motivations profondes du vote des Tunisiens.

Généralement, l'élection d'un président de la République est inscrite dans les résultats du premier tour, qui permettent d'anticiper ce qui pourrait se produire au deuxième tour prévu pour le 14 décembre 2014, ou le 28 du même mois en cas de recours de l'un des candidats contre les résultats.

Hier, le candidat de Nida Tounes est arrivé en tête, suivi de loin par son adversaire Moncef Marzouki, qui essaye tel un noyé de se raccrocher à son siège au Palais de Carthage, tant son mandat de président provisoire de la République a été calamiteux.

L'écart entre les deux hommes et la réserve de voix plus importante en faveur de BCE au second tour prédisent une victoire écrasante de ce dernier sur son rival qui, à l'évidence, s'est avéré incapable de convaincre les Tunisiens du bien-fondé de sa politique.

Le verdict est sans appel. Malgré sa campagne agressive marquée par des attaques virulentes, M. Marzouki n'a pas réussi à conjurer son impuissance.

Ouverture et réconciliation contre sectarisme et affrontement

M. Caïd Essebsi a obtenu 42,7% des voix et M. Marzouki 32,6%, lors du premier tour, selon les résultats à la sortie des urnes. L'écart constaté entre les deux hommes révèle que les Tunisiens ont voté en masse pour celui qui propose l'ouverture et la réconciliation plutôt que le sectarisme et l'affrontement.

C'est un tournant dans la vie politique tunisienne. Les Tunisiens plébiscitent BCE et sanctionnent la gestion catastrophique de M. Marzouki et son alliance avec les salafistes et la milice extrémiste des Ligues de protection de la révolution (LPR) dissoutes par décision judiciaire.

Pendant les derniers jours de la campagne électorale présidentielle, les Tunisiens ont assisté à une bipolarisation du débat politique, à telle enseigne que 5 candidats se sont retirés de la compétition. Les origines de cette bipolarisation résident dans les résultats des législatives du 26 octobre 2014 donnant 70,34% des sièges aux deux partis en tête : Nida Tounès et Ennahdha. Le scrutin présidentiel confirme cette tendance: les candidats des deux partis – Ennahdha ayant bel et bien soutenu M. Marzouki – ont, en effet, accaparé 75,3% des voix exprimées.

Le premier constat est que l'électorat de BCE a manifesté un vote d'adhésion à son projet de société avant-gardiste, à son état d'esprit d'homme d'Etat confirmé et de leader rassembleur. En même temps, la stratégie de Moncef Marzouki consistant à brandir la carte du retour de l'ancien régime n'a pas fonctionné et paradoxalement s'est retournée contre lui.

Le second constat est que la position de BCE à la tête de la présidentielle renforce le climat d'optimisme qui prévaut dans l'opinion publique en Tunisie et à l'étranger depuis le succès de Nida Tounès et les autres partis progressistes aux législatives du 26 octobre 2014.

Le dernier constat est que la victoire de BCE sur ses adversaires illustre sa bonne stratégie pour conquérir le pouvoir ainsi que la formidable efficacité de Nida Tounès, parti qu'il a fondé en 2012, et sa machine électorale performante.

Le sens du vote du premier tour

Les Tunisiens ont voté largement pour celui qui incarne la crédibilité, la stabilité, la compétence, le pragmatisme, la sagesse et la défense des valeurs de la République et de la citoyenneté.

Les soubresauts de Moncef Marzouki et ses partisans d'Ennahdha, salafistes et autres milices des LPR, sont insuffisants pour renverser la situation. Car les reports de force vont sans doute donner une majorité plus que confortable à BCE lors du second tour.

La dégringolade de M. Marzouki va se poursuivre au cours des semaines à venir. Les lignes bougeront très fort et très vite en faveur de BCE surtout avec l'entrée du camp des progressistes dans la bataille électorale à ses côtés. En effet, les intentions de vote pour le second tour sont très favorables au président de Nida Tounès.

*Ecrivain, essayiste, ancien administrateur général et professeur de droit, auteur de ''Tunisie : l'islam local face à l'islam importé'' paru chez L'Harmattan, Paris, octobre 2014.

{flike}