Elections-Banniere

Pour la transparence de l'opération électorale, un décompte parallèle des voix est nécessaire. Et il est facile à mettre en place avec un minimum d'organisation.

Par Mohamed Ben M'Barek*

Dans les pays démocratiques, lors des élections, le résultat du décompte des voix à l'ouverture des urnes est affiché le lendemain dans les journaux, localité par localité. Lors des élections d'octobre 2011 en Tunisie, le délai entre le décompte des voix et les résultats officiels a été une mascarade**.

Rien n'est plus simple techniquement

Au-delà des fraudes possibles pendant le déroulement des élections, la plus fiable pour un organisateur au service du pouvoir est celle qui manipule le décompte pour afficher des résultats qui n'ont rien à voir avec le décompte réel. On soupçonnait même Ben Ali d'avoir le résultat réel et d'en publier un autre.

Pourtant, rien n'est plus simple techniquement que de faire un décompte parallèle des voix. Il suffit d'un minimum d'organisation.

En 2011, il y a eu environ 9.600 urnes utilisées. Il suffit qu'à l'ouverture de chaque urne, il y ait un représentant qui envoie le résultat sur un formulaire web pour qu'on puisse calculer la nuit même la composition de la nouvelle assemblée.

Recueillir informatiquement 9.600 résultats est un jeu d'enfants. C'est un projet informatique qui demande une à deux journées de programmation à un seul informaticien. La principale difficulté est d'authentifier la personne qui soumet le résultat.
Il n'est même pas nécessaire d'avoir de gros moyens. Même avec du logiciel libre et les possibilités gratuites offertes par Google, c'est-à-dire un budget logiciel nul, le système peut être mis en place. La célérité avec laquelle ce site ''Pirate.tn''  a été mis en place montre que, techniquement, cela est tout a fait faisable.
Afficher publiquement le résultat urne par urne est le seul moyen de donner la possibilité à ceux qui ont assisté aux dépouillements de vérifier que c'est bien le résultat réel de leur urne qui a été pris en compte dans le décompte final.

C'est le décompte qui compte

Disposer de 9.600 «informateurs» est la principale difficulté logistique que seule une coalition de partis pouvant imposer à l'Instance des élections (Isie) ses représentants peut résoudre. L'opposition peut ainsi avoir «son» propre résultat indépendamment de la majorité au pouvoir à un moment où le label «indépendant» a perdu beaucoup de sa signification et cache, dans beaucoup de cas, des allégeances inavouées.

Quand j'étais étudiant en France, j'ai été très surpris lorsqu'un de mes amis français s'est excusé en me disant qu'il devait me laisser car il voulait assister aux décomptes des voix dans sa localité.

En démocratie, c'est un devoir d'être soupçonneux envers «l'organisateur des élections».

* Economiste et consultant notamment en systèmes d'informations pour les entreprises.

** Si l'Isie a présenté publiquement les résultats urne par urne de l'élection 2011, publication qui m'aurait vraisemblablement échappée, alors je lui présenterais mes excuses.

 

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