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Que la Providence protège notre chère Tunisie et d'abord de ses mauvais fils qui n'hésitent pas à allègrement la dépecer!

Par Mohamed Ridha Bouguerra*

Il y a, en ce moment, des coups de pied au derrière qui se perdent, trois fois hélas!

C'est là un cri d'une irrépressible rage qui pourrait être le seul, légitime et suffisant commentaire des trois informations qui ont occupé la scène médiatique entre les 16 et 18 août 2014.

L'Assemblée : une calamité nationale

La première de ces nouvelles se rapporte à la calamité nationale qui a pour nom Assemblée nationale constituante (ANC)! Elle concerne certains de ceux qui prétendent nous représenter et qui jouent les prolongations depuis près de 2 ans déjà, faut-il le rappeler?

Faut-il rappeler, encore, qu'à cause de leur absentéisme éhonté, nos députés traînent les pieds depuis des semaines, sinon des mois, pour achever la discussion de la loi sur le terrorisme et contre le blanchiment de l'argent sale? Et cela en dépit de la redoutable et criminelle menace terroriste qui pèse en permanence et dangereusement sur nos braves soldats et force de l'ordre.

Malgré tout cela, les squatteurs du palais du Bardo viennent de faire savoir bruyamment leur désaccord relatif à la retenue sur salaire décidée récemment par le bureau de l'honorable assemblée et qui sera dorénavant appliquée à tout constituant qui se sera absenté sans motif valable plus de 3 fois en un mois.

Il faudrait croire que quelques-uns de nos dignes élus n'ont pas rougi en contestant cette légitime décision! Ils ont, au contraire, crié à l'arbitraire et dénoncé cette sanction qu'ils ont vite assimilée à un lèse-constituants et à leur droit de se remplir encore et encore les poches avant de céder la place le 23 novembre prochain à plus compétents qu'eux, espérons-le!

Rappelons ici ce bon proverbe arabe qui dit «Si tu n'as pas honte, fais ce que bon te semble!»

Des partis qui n'ont pas honte

Ce même proverbe pourrait être opposé à cette coalition qui vient de voir le jour et qui regroupe plus d'une trentaine de micro-partis menaçant de boycotter les futures élections, remettant en cause quelques articles de la loi électorale et en appelant au Tribunal administratif contre certaines dispositions décidées par l'Instance des élections (Isie) relatives aux candidatures de ceux qui sollicitent nos voix.

Qu'est-ce qui a provoqué l'ire de ces fins politiciens qui nous annoncent que nous risquons d'être privés - oh ! le catastrophique dommage ! – de leur irremplaçable candidature au cas où leurs doléances ne seraient pas prises en haute considération!

Tout citoyen désireux de briguer le suffrage du peuple devra, selon une décision de l'Isie, présenter un bulletin n° 3 attestant l'absence de toute condamnation ainsi qu'un quitus fiscal prouvant que le futur parlementaire a normalement réglé ses impôts.

Il n'y aurait là, selon les intéressés que paperasserie et formalités procédurières dont on devrait aisément se passer! Qu'un élu du peuple s'avère par la suite n'avoir pas apporté sa contribution personnelle au budget de l'État ou posséder un casier judiciaire bien fourni, nos hommes de partis ne seraient pas loin de considérer cela comme des vétilles qui ne méritent aucune attention! Le sens civique et celui des responsabilités sont-ils en voie de disparition dans le pays?

La classe politique saine et responsable ne se condamne-t-elle pas, elle aussi, si elle laisse passer de pareilles dérives sans une ferme et énergique dénonciation? Allons-nous donc porter à de hautes fonctions Ali-Baba et les quarante voleurs et remplir l'hémicycle du Bardo de prévaricateurs et autres condamnés pour fraude fiscale? Ne devrions-nous pas faire en sorte que nos futurs représentants et législateurs soient d'honnêtes citoyens au-dessus de tout soupçon, qui ont davantage le souci de l'intérêt général que celui particulier et pensent d'abord à servir l'État plutôt que de se servir?

D'où la nécessaire et large médiatisation de la liste de ces partis qui se sont coalisés pour des raisons peu louables afin que leurs principaux dirigeants qui auront le front de se présenter aux futurs scrutins soient sévèrement sanctionnés !

L'indécence de certains syndicalistes

C'est encore le «Si tu n'as pas honte, fais ce que bon te semble !» qui s'impose comme de lui-même lorsque l'on entend certaines déclarations d'un cadre syndicaliste de l'enseignement secondaire sur la radio nationale, le 18 août 2014. Il nous prédit, superbement, que la rentrée scolaire n'aura pas lieu comme prévu le 13 septembre prochain si les accords conclus juin dernier (diminution d'horaire et nouvelles primes et autres indemnités) n'entraient pas immédiatement en application!

Après avoir réussi, en mai 2014, à la suite de deux grèves, à faire céder le ministère de tutelle qui craignait qu'élèves et parents ne fussent pris en otage à la veille des examens nationaux de fin d'année scolaire, voilà que nos syndicalistes récidivent donc à la rentrée dont ils annoncent ainsi un bien chaotique démarrage! Quel bel exemple de ponctualité, de sens des responsabilités et de sens civique ils donnent à nos chères petites têtes brunes qui risquent de se heurter le premier jour de classe à des portes closes!

Engager un bras de fer avec le ministère de tutelle, en ce moment fort critique que traverse le pays tant sur les plans économique que sécuritaire, c'est vouloir donner une image catastrophique de la faiblesse de l'État.

Il faut donc espérer que cette grève annoncée n'aura pas lieu. Il n'en demeure pas moins qu'en agiter seulement la menace est, aujourd'hui, d'une indécence et d'une obscénité inqualifiables qui ne dénotent qu'une totale absence de civisme et du sens des responsabilités de la part du cadre syndicaliste, auteur de cette menace.

Houcine Abassi, secrétaire général de l'UGTT, est appelé, en les circonstances graves que nous vivons, à mieux tenir ses troupes et à mieux soigner la communication au sein de la centrale syndicale, car le préjudice que des propos comme ceux rapportés plus haut ne manquera pas de rejaillir sur l'ensemble de l'organisation de feu Farhat Hached.

Si l'Ugtt prétend, bien légitimement, au prix Nobel de la Paix, elle ne doit, en effet, ni cautionner ni couvrir ceux qui prennent notre jeunesse en otage et entravent son accès au savoir. Nos syndicalistes doivent bien prendre en considération qu'il existe d'autres formes de revendication que la grève.

Si la protestation est légitime quand elle vise la défense de valeurs universelles comme celles de liberté, de justice, d'égalité et d'une équitable répartition des richesses nationales, elle devient un fléau social quand elle verse dans un néfaste égocentrisme et un corporatisme de mauvais aloi!

Inutile de pratiquer la politique de l'autruche et de nous cacher la triste réalité, nous en sommes bien arrivés au stade où chacun ne pense plus qu'à engranger le maximum d'avantages aux dépens d'un État dont les caisses sont vides et alors que le terrorisme frappe à nos portes!

Que la Providence protège notre chère Tunisie et d'abord de ses mauvais fils qui n'hésitent pas à allègrement la dépecer !

* Universitaire.

 

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