mahmoud el may 8 3La position d'Al Joumhouri, après les assassinats du député de l'opposition Mohamed Brahmi et des 8 soldats au Mont Chaambi, a beaucoup gagné en clarté. L'auteur l'explicite dans la note que nous reproduisons ci-dessous.

Par Mahmoud EL May*

 

Dès la proclamation des résultats du 23 octobre, Al Joumhouri (alors dénommé Parti démocratique progressiste, PDP) a été le premier parti à féliciter les vainqueurs. Malgré l'appel à l'élargissement de la majorité et à la participation au nouveau gouvernement, notre parti a immédiatement proclamé que sa place était dans l'opposition.

Trois mois après (février 2012), les partis d'opposition ont été invités au siège du 1er ministère pour une réunion d'information et de débats. Malgré une faible disposition du pouvoir à engager un débat sur les vrais problème du pays, Al-Joumhouri s'est clairement prononcé, dès le mois de mai 2011, pour une poursuite du dialogue entre gouvernement et opposition, en proposant même des procédures pour engager ce dialogue.

Convaincus de la nécessité d'établir de canaux continus de discussion avec le pouvoir, nous avons entamé, dès l'été 2012, la discussion de sujets sensibles: rédaction de la constitution, dissolution des Ligues de protection de la révolution (LPR), sécurité, développement économique... Cela impliquait de travailler dans un cadre constructif, dans le cadre de l'intérêt de la nation.

Nous l'avons fait, jusqu'au 24 juillet, en travaillant dans un cadre de franchise et dans un esprit constructif, au point que nos partisans et amis nous ont critiqués. En réalité, nous étions convaincus que, dans une perspective de longue durée, seul le dialogue peut réellement conduire à l'apprentissage du «vivre ensemble» et à la démocratie.

Après l'assassinat de Mohamed Brahmi et de 8 de nos soldats au Mont Chaambi, Al-Joumhouri est convaincu que la Tunisie n'a pas un gouvernement en mesure d'assurer sa sécurité et de maintenir l'ordre et la stabilité dans le pays: ou il dispose d'informations sur les extrémistes auteurs des attentats et il ne veut pas les divulguer, et cela est grave car il relève du mensonge et de la haute trahison. Ou il n'a pas d'informations sur ces individus ou ces groupes, et cela relève de l'incompétence.

Les évènements qui ont ponctué la vie politique depuis 20 mois renforcent la conviction de tous les Tunisiens dans le constat de la faillite du gouvernement. Celui-ci ne peut plus gérer le pays, son incompétence est avérée et sa légitimité révolue; le peuple demande aujourd'hui son départ. Au lieu de s'incliner devant ce constat d'échec et de rechercher le dialogue, le pouvoir adopte une stratégie de confrontation.

Il est alors nécessaire, pour préserver notre pays des agitations, de procéder aux mesures suivantes:

1. Démission de l'actuel gouvernement et mise en place, dans les 15 jours, d'un Gouvernement de Salut national, à caractère technique, avec à sa tête, un chef de gouvernement indépendant, neutre, compétent et qui fait consensus entre les différentes parties. Les membres de ce gouvernement ne se présenteront pas aux prochaines élections et aucun parti n'en aura le leadership. Ses missions: soutien du processus pour l'organisation des élections, renforcement de la sécurité, actions de développement régional et appui accru à l'emploi, gestion des affaires courantes. Critères de nomination: compétences et non-alignement. Ces nominations doivent être basées sur le principe du consensus.

2. Dissolution immédiate, réglementaire et effective des LPR. Une loi imprescriptible punira tous ceux qui s'en prévalent; constitution d'une commission d'enquête sur l'assassinat de Mohamed Brahmi en y mettant tous les moyens; poursuite effective des assassins de Chokri Belaïd, l'annonce de leurs noms étant insuffisante, et identification des responsabilités sur l'assassinat de Lotfi Nagdh.

3. Dissolution immédiate de L'ANC, et fin des travaux sur les articles de la constitution objets de différends par des experts; celle-ci sera soumise à un référendum.

4. Mise en place immédiate d'un Conseil Transitoire de Sécurité Nationale. Attributions principales: élaboration des mesures de lutte contre le terrorisme et de maintien de la sécurité.

5. Mise en place, dès le 10 août, d'une commission indépendante, pour l'examen des nominations indues des 15 derniers mois dans les postes administratifs de décision et d'Autorité. Elle rendra son rapport fin septembre pour que les autorités puissent procéder aux correctifs nécessaires.

* Député d'Al-Joumhouri.

Illustration: le député Mahmoud El May.