Déjà victime des réformes intempestives mises en route par Ben Ali et de la généralisation de la corruption, l’enseignement en Tunisie risque aussi d’être mis à mal par les projets d’«islamisation» en cours.

Par Rachid Barnat


 

Un professeur écrit sur sa page facebook: «J’ai donné un simple exercice aux étudiants de la troisième année leur demandant de mettre des phrases à la forme interrogative. 95% ont répondu incorrectement!». Et de conclure désappointé devant cet amer constat: «Et l’année prochaine, ils chanteront qu’ils sont ‘‘diplômés-chômeurs’’.»

Mais la faute à qui?

Les élèves tunisiens sont d’abord les victimes de Zaba.

Comment? Rappelons-nous, Bourguiba a misé sur l’éducation nationale à laquelle, fait rare dans le monde, il a parfois consacré jusqu’à 33% du budget national. Il a voulu à travers l’école former et instruire les générations qui accompagneront la modernisation de la Tunisie comme il l’a toujours souhaité.

Ce système a très bien marché, puisque ceux qui sont passés par le «moule» de l’école de la république sont nombreux à maîtriser aussi bien l’arabe que le français mais aussi à avoir acquis un certain bagage intellectuel et culturel leur permettant de compter parmi les élites les mieux armés de leurs générations et de celles du monde dit «arabo-musulman».

 

Faculté des sciences humaines et sociales de Tunis

Mais Zaba, avec son complexe du «bac moins trois», va en décider autrement.

Il va mettre par terre ce système éducatif de qualité pour le remplacer, suite aux réformes intempestives qu’il préconisait, par une médiocrité de programme pour ne pas dire une indigence de certaines matières...

Le résultat: des élèves sortis sous Zaba, devenus eux-mêmes enseignants, n’ayant pas bénéficié d’un bon niveau de savoir, ne pouvaient transmettre que celui qu’ils ont acquis, c’est-à-dire MÉDIOCRE! Qui le leur reprocherait? Comment pourraient-ils transmettre un savoir qu’ils n’ont pas acquis? Une grande partie d’entre eux n’ayant pas le bagage minimum requis pour transmettre un quelconque SAVOIR.

2- Les élèves tunisiens sont ensuite victimes de la corruption.

Il ne faut pas oublier que dans le système du «tout argent» propre à Zaba, l’enseignement public a été délaissé au profit du privé. Beaucoup d’enseignants ont été complices en faisant qu’aucun élève ne pouvait réussir sans passer par des cours «privés», et où les diplômes se vendent et s’achètent au grand dam des plus démunis parfois meilleurs que leurs copains pistonnés et fortunés.

Certaines amies enseignantes me confirment que cette pratique s’est généralisée parmi leurs collègues pour leur permettre de boucler les fins de mois à cause d’un salaire de misère, affirment-elles.

 

Ben Ali a abaissé, par ses mauvaises réformes, la qualité de l'enseignement

Et malgré la corruption généralisée qui a touché tous les secteurs dont celui de l’éducation nationale, les parents se saignaient souvent aux quatre veines pour payer des cours particuliers à leurs enfants dans l’espoir de leur assurer un meilleur avenir que le leur.

Les plus nantis, conscients du niveau auquel l’éducation nationale est parvenue sous le régime de Zaba, envoyaient leurs gosses dans des écoles et des universités privés dont le système a conservé les programmes et les méthodes de l’époque Bourguiba. Ou mieux ils les envoyaient acquérir un savoir de qualité dans les meilleures écoles et universités du monde.

Voilà comment le niveau est devenu de jour en jour plus médiocre dans tous les domaines.

Les élèves tunisiens vont-ils être bientôt victimes de l’islamisme?

 

L'ordinateur à l'école, beaucoup de publicité, peu de concret

Ghannouchi obtiendra, en effet, en ce domaine un résultat encore pire que Zaba, puisque nombre de ses partisans envisagent sérieusement de revenir:

-  à l’école coranique qui, pour les filles, constituera la limite de leur savoir;

- à l’université religieuse, en transformant notre auguste mosquée Zitouna en un lieu de savoir universel islamique où l’on étudiera l’architecture islamique (sans doute celle des tours des émirats du Golfe et d’Arabie!), la médecine islamique (sans doute celle des belles cliniques des émirats du Golfe tenues par des étrangers!), la finance islamique (sans doute celle pratiquée par l’émir du Qatar qui investit et spécule en Occident, y compris dans des sociétés d’armements comme Lagardère!) et la justice islamique, dont Ghannouchi veut réactiver «la cellule à fatwas», lois arbitraires au-dessus des lois civiles, souvent à la demande et pour servir un chef, dont ne se privent d’ailleurs pas l’émir du Qatar et le roi d’Arabie!

Alors que dans le même temps il ne cesse de répéter qu’il ne touchera pas au code civil, sauf que Jebali son chef du gouvernement affirmait qu’il abrogera toute lois de ce code civil qui ne serait pas conforme à la chariâ!

Evidemment surtout pas la philosophie, cette science qui fait penser, réfléchir… et qui de ce fait est la bête noire des salafistes !

Pauvre Tunisie, dont les institutions sont mises à mal par une bande d’utopistes qui veulent ramener les Tunisiens des siècles en arrière!

Alors qu’en réalité, si la Tunisie veut garder sa place et même l’améliorer, il n’ y a qu’une solution :

 

Faculté de Manouba

- redonner à l’éducation sa priorité dans les budgets de l’Etat,

- exiger la qualité d’un enseignement ouvert sur le monde, et

- revaloriser le métier d'enseignant.

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